Tout d'abord un rapide avis : Très beau esthétiquement, fort intéressant sous de multiples aspects. Je déplore quelques choix qui me semblent peu cohérents (comme le fait de traiter l'Anglais comme du Portugais), mais je trouve que beaucoup que ce que d'autres peuvent lui reprocher viens d'une approche très particulière du discours. Plurilinguiste, puisque je me rapelle de ce mot. Et plus ou moins vaguement de ce qu'il recouvre.
Ensuite rapidement le pitch : Deux jeunes jésuites vont au Japon -où les Chrétiens sont alors persécutés mais encore relativement nombreux- pour retrouver leur mentor, qui aurait soit-disant renié sa foi.
Scorcese, Adam Driver, Andrew Garfield, Liam Neeson et j'en passe. Keskefout tout ce beau monde en ddehors de Star Wars Tekken et Spider Man ? -Scorcese, précisément.
Maintenant laissez moi développer. (siouplait)
Tout d'abord c'est beau. Et, ce qui est plutôt pour me plaire, il n'y a pas de contemplation à proprement parler. L'esthétique a du sens, elle n'est jamais présente pour parler d'elle même.
Ensuite le film est narrativement éclaté. Il passe d'un début d'aventure, à une installation/stagnation dans un village, à une séparation à bien d'autres choses encore. Le chemin n'est pas linéaire, il est presque secondaire en un sens. Retrouver leur mentor reste son but, mais devient pour lui une contingence qu'ils ne maitrise pas.
Et le film n'a pas de discours uni. Il montre l'horreur de la persécution, tout en montrant un personnage assez incapable de légitimer sa mission. Non pas qu'il ne se défende pas, mais sa défense n'est pas celle du juste martyr ; elle est celle d'une homme, qui doute et souffre, et n'a pas toujours dans sa bouche les élans rhétoriques les plus flamboyants des dialoguistes hollywoodiens quand viens le temps de défendre leurs grands idéaux. L'inquisiteur est une autre voix, pas un antagoniste. Il présente un autre discours. Et à côté de cela d'autres voix s'ajoutent. Et aussi mineures soient-elles, elles ne sont pas là pour faire partie d'un discours qui sous tendrais le film. Elles existent à part entière.
C'est pour cela que je voulais parler de plurilinguisme. Parce que à mon sens ce n'est pas un film qui porte un discours. Il en contiens intentionellement plusieurs. Et joue de cet éclatement.
Et malgrès quelques maladresses qui sont trop lointaines dans ma mémoire pour que je les détaille ici, je trouve que c'est dans cet éclatement qu'il trouve son sens.
Parce qu'il arrive par là à une complexité rare. Il donne à penser, plus qu'il ne donne de la pensée.
Et pour toutes ces raisons, je comprend que l'on puisse s'y perdre.
Revenez au titre de la critique ...
C'est un film qui joue d'une certaine distance, d'une réflexivité qui se fait aussi pendant qu'on le regarde. Parce qu'il prend son temps.
Et c'est bien sur dangereux, c'est un jeu par lequel on s'aliène forcément ceux qui ne voulaient pas réfléchir en allant au cinéma. Et on ne peut pas s'en vouloir pour ça.
Mais pour moi le pari est réussi, j'ai eu la très rare et magnifique impression de pouvoir penser à ce que je vois tout en le voyant.
Et pirouette finale.
Quand au reste
Le reste est Silence ...
Blup.
Valentwerk approves