Silent Hill : Revelation 3D par Desolation
Voilà, j'ai laissé un peu le film mûrir dans ma tête, j'ai laissé passer un peu de temps donc maintenant je peux m'atteler à la critique de SIlent Hill Revelations 3D (au passage je n'ai pas vu la version 3D).
A la sortie de la séance, un malaise : déjà fini ? Mais il ne s'est rien passé. Je pense pourtant que j'ai été emballé par les décors, et certains cadrages très sympa qui évoquaient vraiment la série de jeux vidéo : je pense par exemple à l'entrée de Heather dans l'asile de Brookhaven, avec une caméra planquée derrière la loge de l'accueil, avec cette lampe qui grésille, ce léger travelling et cette grille qui déclenchent le genre de sensations que l'on connaît bien à travers le jeu vidéo. Hélas, mille fois hélas, tout n'est pas dans ce goût. Silent Hill Revelations en fait trop, beaucoup trop.
Le problème du film est multiple : d'abord, il explique trop. Les joueurs de la série verront bien que l'équipe du film a pensé à faire de nombreuses références cette fois-ci à Silent Hill 3, mais le problème c'est qu'il n'en a pas repris la tonalité. On baigne dans un amour cliché de famille avec bien sûr à côté la petite histoire d'amour ratée. La puissance des émotions était pourtant au coeur du dispositif narratif des Silent Hill en jeu vidéo : c'est parce que Harry Mason aimait sa fille qu'il partit inconsciemment à sa recherche dans Silent Hill 1, c'est parce que James Sunderland aimait sa femme qu'il explora dangereusement la ville dans SIlent Hill 2, c'est parce que la névrose et la quête de vérité de Heather sont profondes qu'elle finit par se rendre dans la ville dont on la tenait si fermement éloignée dans Silent Hill 3. Pourtant, ces émotions, ces attachements, ne sont jamais l'objet de longues cinématiques baveuses, tout n'est que sous-entendu, choses implicites... La motivation du héros à retrouver sa fille ou sa femme ou sa vérité, n'est mise en mouvement que par la capacité du joueur à avancer la crampe au ventre. Le personnage du jeu ne se rend pas compte du cauchemar qu'il traverse, car ce sont souvent des détraqués, des dépressifs, et c'est au joueur d'en faire la pleine expérience.
Dès lors, la Heather de Silent Hill Revelations est très pauvre de ce point de vue, car elle est finalement très normale. Elle est la part de tout ce qui était bon chez Alessa, et finalement cela fait d'elle une personne normale, grande gueule à peine (on est loin de la Heather du jeu) et qui a du mal à dialoguer avec Silent Hill. Je crois fermement que le dispositif de l'horreur dans le jeu est impossible à retranscrire au cinéma. Silent Hill faisait peur grâce à des mécanismes propres au jeu vidéo, ça fourmillait d'idée de gameplay ; d'un autre côté le film se contente de nous abreuver de clichés et point. Il n'y a pas vraiment d'intelligence, on nous met tout à l'écran sans traitement.
Il y a clairement des abus, notamment ce pauvre Tête de Pyramide qui est désormais identifié comme le gardien et le bourreau d'Alessa, alors que merde, à la base c'est un symbole hautement plus vicieux, il n'est pas si facilement identifiable. Mais non, le film doit expliquer et poser des explications sur chaque élément qui aurait pu se retrouver riche en interprétations. Pourquoi le faire se battre dans un combat ridicule qui évoquera une joute de Soul Calibur entre Nightmare et Voldo ? Silent Hill n'est pas fait pour ça, il n'a jamais fait dans la représentation de combats pseudo-épiques (souvenez-vous la bataille contre les deux Têtes de Pyramide à la fin de Silent Hill 2 : l'objectif n'est pas de les tuer mais d'éviter toutes leurs attaques pendant un certain temps). A trop vouloir en faire, le sens se perd et au final, Tête de Pyramide est vidé de tout son sens, ce qui est intolérable.
Dans le film de Gans, le traitement était plus subtil même s'il y avait des choix de réalisation douteux. Mais au moins, à la fin du film, on avait plusieurs hypothèses, plusieurs interprétations : Rose et Sharon étaient-elles piégées dans SIlent Hill ? Etaient-elles en réalité mortes dnas un accident ? Non, dans Silent Hill Revelations tous les doutes sont écartées et ce qui faisait le mystère et le charme du premier film sont littéralement saccagés ; à la fin de Silent Hill Revelations on n'a rien à se mettre sous la dent, le film est fini mais pas achevé. Si, on nous annonce quand même qu'il y aura un Silent Hill 3 qui semble faire référence à Silent Hill 2 le jeu.
Voilà, donc au final, comment résumer ce film ? Dans la richesse des clins d'oeil, au final, il ne nous propose jamais une adaptation du jeu, les personnages sont beaucoup trop lisses et leur développement trop sommaire, on ne flippe jamais vraiment, on n'est jamais vraiment dégoûté, car on respire trop, certaines révélations sont bien trop pauvres et certains mystères pas assez brumeux si ce n'est la grande question qui planera pendant environ deux heures : quel était l'intérêt de faire ce film ?