Déjà rôdé aux techniques de mise en scène, le cinéaste fait preuve d’une adresse qui force le respect et l’admiration. Les trouvailles sont nombreuses et jalonnent efficacement le récit sans pour autant le surcharger. Même chose pour les dialogues, relativement rares mais toujours nécessaires, comme si chaque mot avait soigneusement été soupesé lors de la phase d’écriture. On pourrait également s’attarder sur le soin apporté aux raccords de certaines scènes, qui contribuent chacune à leur manière à éclairer le spectateur, histoire de lui soumettre une piste mais sans lui en dire plus. Il s’en dégage une impression d’unité brisée que seule une lecture attentive pourra re-assembler. Côté interprétation, c’est le deuxième grand retour de Bruce Willis après Pulp Fiction. Étonnant par la sensation de fragilité contrôlée et réprimée qui émane de son personnage, il parvient à rendre crédible un rôle pourtant casse-gueule sur le papier. Une performance au diapason de celle de son jeune vis-à-vis dont le regard terrifié a marqué pour longtemps les esprits. La relation qui va s’établir entre leurs deux personnages va quant à elle orienter le récit et en accélérer progressivement le rythme jusqu’au twist final le plus mémorable des 90’s avec peut-être celui d’Usual Suspects. Avec ce film, M. Night Shyamalan démontrait un savoir faire relativement bluffant pour son âge, que ce soit l’écriture, la mise en scène, la direction d’acteurs ou simplement ce don pour nous conter une histoire sous un angle original. On a rarement été aussi content d'être mené en bateau. Peut-être parce que le capitaine savait où il allait.