Chapeau bas, Mr Tarantino ! "Jackie Brown" prend tout son temps, adapté au biorythme de protagonistes bien cassés par la vie (la plus jeune, Mélanie plane en permanence, ce qui revient au même). L'histoire de la double-arnaque est très bien ficelée, avec des retours en arrières, des points de vue des différents personnages (lors de l'échange de sacs),... Robert de Niro en taulard fraîchement sorti un peu paumé est excellent tout comme Samuel L. Jackson avec une coupe... et un bouc... bref. Ce climat plus reposé donne davantage d'effet aux rares scènes de violence, d'une sécheresse à sursauter (le meurtre de Beaumont et surtout ceux de Mélanie et Luis.) le film, le scénario et la caméra de Tarantino s'attarde surtout - amoureusement et respectueusement - sur le duo exemplaire formé par Jackie et le prêteur Max Cherry. Là encore, il est allé chercher un comédien qui eût une petite heure de gloire dans les années 60-70 (Robert Forster fut le catalyseur de la passion ambigüe de Brando dans "Reflets dans un oeil d'or" de Huston) avant de sombrer dans des films médiocres, des polars de troisième zone que son physique buriné à la Bronson lui offrit faute de mieux. Quand on le voit dans "Jackie Brown", il y a de quoi demander la raison d'un tel gâchis. Son regard au moment où il vient chercher Pam Grier à sa sortie de prison (aidé par un thème musical aux petits oignons en fond) en dit plus qu'un long discours. Ils ne sont pourtant pas des poulets du jour et Tarantino continuera de les filmer comme deux tourtereaux à qui on ne la fait plus. L'élément fort étant bien sûr Jackie, étonnée et ravie de son charme.