Ce documentaire de 52 mn étudie l’extermination des populations juives par les nazis durant la 2nde guerre mondiale à travers l’exemple du camp de Sobibor. Il est synthétique bien sûr mais peut parfaitement convenir à des élèves de collège et lycée qui souhaitent l’aborder (par exemple dans le programme d’histoire de Terminale). Il permet de mieux comprendre l’extermination industrielle mise en place par le Reich. Dans ce camp, de 1942 à 1943, près de 2 000 Juifs et Juives ont été tué(e)s chaque jour. Dès leur arrivée par convoi ferroviaire, les déporté(e)s se voyaient remettre une carte postale à envoyer à leur famille pour leur expliquer que tout allait bien ! On dispose dans ce documentaire du témoignage d’historiens et historiennes qui ont travaillé sur Sobibor mais aussi de témoignages précieux de survivant(e)s filmé(e)s en 1995. Tous ceux et celles qui pouvaient travailler pour le Reich le faisaient jusqu’à ce qu’ils ne le puissent plus, les autres (inutiles) étaient invariablement exterminé(e)s dans les chambres à gaz. Un homme qui travaillait dans le textile avant la guerre a été envoyé dans les installations où les vêtements des prisonniers et prisonnières étaient triés pour être réutilisés, témoigne qu’il a trouvé parmi le tas de vêtements dont il s’occupait, le pantalon de son ami qu’il a reconnu sur le coup…Pourtant, il n’en reste rien aujourd’hui, le camp ayant été démantelé et détruit en 1943 : toutes les installations devaient disparaître, des arbres ont été replantés par les Allemands pour cacher l’ampleur des massacres.
Ce démantèlement systématique des installations du camp s’explique car le 14 octobre 1943, à 16h, un groupe de prisonniers et prisonnières a tenté le tout pour le tout en s’évadant, tuant 9 soldats allemands dans leur fuite. C’est la seule évasion d’un camp nazi qui ait en partie réussi. Sur les plus de 300 évadé(e)s de Sobibor, la plupart ont fini par être repris ou sont morts après avoir fui le camp mais une soixantaine ont survécu et ont pu témoigner de ce qu’ils ont vécu. Ceux et celles qui étaient resté(e)s à l’intérieur du camp, qui s’étaient rendu(e)s ou caché(e)s, ont été abattus sans la moindre hésitation. La décision d’Hitler a alors été rapide : c’est la fermeture de Sobibor et la destruction de tous les bâtiments pour en cacher l’horreur. Voilà pourquoi pendant des décennies, on a eu très peu d’informations sur ce camp, fermé assez vite. Depuis, ce sont des archéologues qui y ont effectué des fouilles et qui ont permis d’exhumer des objets du quotidien voire des objets personnels émouvants et dont on a pu identifier le/la propriétaire. La découverte de dizaines de photos allemandes du camp en fonctionnement (rarissimes) nous montre un quotidien des SS en apparence détendus et joyeux, nous masquant totalement la barbarie qui était la norme. On voit cependant sur une photo derrière des SS un troupeau d’oies. En criaillant, elles servaient à cacher les hurlements venus du camp…Une historienne raconte à juste titre que ces photos semblent montrer un simple camp de vacances pour soldats ! Ce sont ces photos qui ont pu permettre de faire des reconstitutions numériques très précises des différentes parties du camp (bien plus petit que Auschwitz).
Au départ le moins connu des camps, faute d’informations disponibles, Sobibor est aujourd’hui un de ceux sur lesquels on a le plus de sources. Thomas Blatt, un des rescapés de 1943, est mort à 88 ans en 2015. Il était chargé de couper les cheveux des femmes et il a témoigné en 2010 lors du procès d’un homme qui était accusé d’avoir été un des gardiens de Sobibor. Il est juste dommage que ce documentaire soit un peu court mais il est essentiel par ses témoignages. Pour le compléter, regardez l’immense documentaire de 2001 réalisé par Claude Lanzmann, « Sobibor, 14 octobre 1943, 16 heures », grâce à un entretien avec Yehuda Lerner, un autre rescapé de ce camp nazi. Une mémoire qui ne doit jamais s’éteindre malgré la disparition progressive des derniers témoins directs.