Retour dans l'Italie des années 70 avec ses hippies crasseux à la violence débridée, commettant de minables hold-up au prix du sang sous l'oeil quasi-complice d'une justice laxiste. La police a les mains liées, coincée entre une population hurlant à l'insécurité, des avocats tout-puissants défendant sans vergogne les criminels, et des journalistes gauchos prêts à dénoncer le moindre loupé des forces de l'ordre.


Pour autant, ce poliziesco se démarque clairement des habituelles bisseries bas du front qui se contentent de mettre en scène un homme providentiel favorisant l'action punitive à la paperasse et au respect des droits du prévenu. Enrico Maria Salermo incarne ici un commissaire plus tempéré, qui se plaint bruyamment de ses difficultés à faire son métier mais dont la probité lui refuse de dénigrer la Loi, même dans ses imperfections. Société Anonyme Anti-Crime a ainsi l'intérêt d'aborder la problème de la violence par le risque d'émergence de dérives policièro-miliciennes d'obédience fasciste qui s'autorisent à faire le ménage de manière radicale chez les voyous puis à éteindre son champs d'action dans tout ce qui ne file pas droit (les prostituées, les homosexuels et les militants syndicalistes). Un thème qu'on retrouvera dans d'autres œuvres dont, en plus nanar, Ne réveillez pas un flic qui dort avec Delon. SAAC se garde donc d'apporter un regard simpliste sur la problématique du maintien de l'ordre et du délicat équilibre des droits du policier et du citoyen, dans une atmosphère finalement assez nihiliste.


L'interview bonus sur le DVD de Artus est intéressante dans sa recontextualisation du polar italien au sein du cinéma de genre et plus particulièrement de ce film très atypique parmi les siens et surtout dans la filmographie de son réalisateur, Steno (ici sous son véritable patronyme de Stefano Vanzina), grand pourvoyeur de comédies familiales. Le casting fonctionne très bien, Salermo en tête, avec à ses côtés une Mariangelo Melato au physique très troublant. SAAC n'est pas un film d'action, préférant exposer ses enjeux par les scènes de dialogues et d'enquête, avec une superbe idée de conférence de presse en bus nocturne pour démontrer par le terrain des turpitudes romaines l’aberration des contradictions législatives à laquelle se heurte la police. L'amateur du genre appréciera également de retrouver les majorettes pots de yahourt, symboles de l'industrie automobile italienne, et les menaces de mutation en Sardaigne comme infamie suprême.


Les nanarophiles avisés repéreront également un joli lancer/écraser de mannequin en mousse et la bande-annonce de Operation K dont le doublage français a été confié à l'équipe des films de ninjas de Godfrey Ho.

Créée

le 28 mars 2021

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