L’armée décombre.
Lorsqu’il se frotte à l’Histoire, Verhoeven ne cède jamais au vernis figé de la reconstitution ou du manichéisme propre à la légende. On l’a déjà constaté dans le XIXème de Katie Tippel, on le...
le 23 mai 2016
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C’est le premier film de Verhoeven que je vois dans sa période hollandaise et c’était vraiment très bien, une belle fresque historique comme je les aime avec un petit quelque chose en plus. La principale force de Soldier of Orange réside dans ses personnages qui bénéficient d’un excellent traitement d’écriture et qui évoluent vraiment au fur et à mesure de l’avancée du conflit. La phase introductive du film voit ce groupe d’amis se former, chacun avec sa personnalité suffisamment détaillée pour tous les cerner même si l’action est principalement centrée sur Erik et Guus. Verhoeven évite tout de même de tomber dans le piège de trop délaisser les personnages secondaires et garde un juste équilibre, ce qui permet vraiment de s’attacher à ce groupe de potes. Groupe qui se verra séparer à la fois physiquement et idéologiquement par l’invasion allemande.
Soldier of Orange allie le tragique et le comique pour créer finalement une féroce satire de la guerre notamment sur un plan socio-politique. Le film ne manque pas d’humour même si le fond de l’œuvre est tout de même assez dramatique. Le traitement de la guerre est ici vraiment original avec une dérision assez incroyable. L’armée néerlandaise qui capitule alors que le conflit vient à peine de démarrer, l’équipe de bras cassés qui va faire de la résistance, la reine qui gouverne toujours dignement son pays qui ne se résume plus qu’à une simple maison avec jardin dans la banlieue londonienne… Cette dose humoristique permet d’apporter une touche de légèreté appréciable qui, mine de rien, appuie plutôt bien la dimension aventuresque du film.
Il faut aussi noter que l’ensemble de l’histoire brille grâce à son absence de manichéisme primaire. Si certains liens entre personnages restent amicaux, d’autres se brisent sans toutefois disparaître totalement. J’ai adoré ce passage où Erik danse avec son ancien ami devenu collaborateur. Tu sens une certaine rancœur entre les deux personnages tout en les sentant encore attachés l’un à l’autre grâce au fond d’humanité qui leur reste. En ça Verhoeven a signé un grand film sur ce que représente l’amitié, les rapports humains en règle générale, et sur le « choix du destin » (ça n’enlève rien au manque d’inspiration du titre français…). C’est aussi un film sur les choix que l’on nous impose et que l’on s’impose. Et Soldier of Orange fait preuve d’une grande subtilité qui s’exprime aussi par une absence de jugement de valeur sur l’action des personnages. Pas de glorification de l’héroïsme qui est illustré ici comme un moteur de la résistance et de la victoire avant de se retrouver noyé dans le tumulte de l’après-guerre. Un héroïsme dont certains ont payé le prix fort. J’ai aussi aimé la façon avec laquelle Verhoeven traitait ces morts. Brutales, sans concessions, les héros disparaissent subitement à l’image de leur mise à mort, d’une violence sèche. Comme si ils n’avaient jamais existé et c’est bien ça le plus dramatique.
Ce film a franchement de tout. De l’aventure, de l’humour, du drame, du suspense. Et tout ça traité de façon très intelligente. Mais (car il y a toujours un mais), je trouve qu’il y avait matière à développer encore davantage le film, à l’enrichir de détails pour constituer une plus grande fresque encore et épaissir encore les autres personnages plus secondaires. Ceci dit, c’est sûrement le cas de la version télé dont je souhaite très fortement la venue dans nos contrées un beau jour. Loin de la représentation manichéenne de la guerre assez représentative du genre, ce Soldier of Orange constitue une belle bouffée d’air frais avec une vraie ambiguïté et une belle ambition derrière. Voici une nouvelle preuve, si il en fallait encore une, que Verhoeven est bel et bien un patron.
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