Principalement connu pour deux westerns d’une puissance cinématographique peu ordinaire ( d’une part l’ultra-violent Django en 1966, concert baroque en forme de règlements de compte proprement jubilatoires ; d’autre part Le Grand Silence, tragédie hivernale flanquée d’un Jean-Louis Trintignant mutique et d’un Klaus Kinski plus menaçant que jamais, tournée deux ans plus tard…) Sergio Corbucci fut néanmoins l’auteur de près d’une soixantaine de productions toutes plus inégales les unes que les autres.
C’est au cœur des années 80 qu’il tourne Sono un fenomeno paranormale, alors que sa carrière connaît un succès considérable quant aux recettes du box-office, succès doublé d’un accueil pour le moins mitigé de la critique, peu encline à saluer la productivité un brin inconséquente dudit Sergio. Farce finalement assez sympathique voir même séduisante dans ses meilleurs éclats ce petit film - arborant un titre clairement orienté bis - ne trompe aucunement sur l’argument proposé de prime abord ; proche de la satire médiatique Sono un fenomeno paranormale brosse à grands coups de caméra le portrait d’un véritable oligarque du petit écran : l’inénarrable Roberto Razzi ( Alberto Sordi, tour à tour sourd aux enchantements puis littéralement illuminé, superbe de bout en bout par son intensité ) animateur TV ne jurant que par la science et ses inaliénables vérités, gourou sceptique passant au crible tous les stratagèmes mensongers de la spiritualité au point d’en faire le fond de commerce de son émission fortement plébiscitée par-delà le monde… S’ensuivront un voyage aux Indes et la chute accidentelle de Razzi lors d’une promenade à dos d’éléphant, transformant subrepticement l’homme de raison en véritable prophète des phénomènes inexplicables et inexpliqués…
Sans réellement dépasser son sujet, s’y cantonnant même avec modestie et bienveillance Sono un fenomeno paranormale s’inscrit délibérément dans la veine d’un certain cinéma burlesque, jouant de ses effets slapstick avec audace et authenticité ( ici Sergio Corbucci sublime lourdement la chute d’un éléphant à renfort de slow motion tout droit hérités d’un Keoma ; là il triture les formats d’image pour mieux souligner les hiatus des diffusions télévisuelles altérées par les dons de Razzi…). Alberto Sordi porte presque à lui seul le potentiel d’une comédie fantastique certes dispensable mais d’une amicalité pratiquement touchante et réussie dans son genre. Tendre et cocasse.