Sortilèges est un des exemples les plus caractéristiques du cinéma français des années 40, élaboré dans les dures conditions de l'Occupation et adoptant un genre proche du cinéma fantastique, sans une once de surnaturel mais privilégiant l'étrange, le mystérieux et les personnages hors normes.
Le tournage de Sortilèges a d'abord lieu dans Les Cévennes au Puy de Sancy, point culminant du Massif Central.
Abondamment enneigé en hiver - surtout dans les précédentes décennies-, il offre un paysage aux pentes et arêtes impressionnantes où semble régner un éternel hiver.
La même équipe que celle de l'Assassinat du Père Noël est à l'oeuvre. On y retrouve Renée Faure, toujours éthérée se laissant là aussi mourir d'une étrange maladie de langueur jusqu' à ce que l'inquiétant rebouteux du coin, Le Campanier, joué par Lucien Cosdel - Papa du petit Roger dans l'Assassinat du Père Noël - vienne la guérir et que son ami d'enfance lui avoue son amour.
L'atmosphère du film est ainsi créée, poétique et fantastique, nous transportant d'abord dans une cabane perdue on ne sait où dans le brouillard, où sonne inlassablement une cloche, pour guider d'éventuels voyageurs vers le village voisin.
A côté de l'étrange sonneur de cloches, Le Campanier, l'histoire présente un homme surnommé Le Lièvre - à moitié fou car persuadé d'avoir un lièvre dans sa tête qui vient lui enlever toutes ses pensées, dès qu'une d'entre elles apparaît-.
Un cheval noir surgit dans le brouillard. Laissant son compagnon endormi, Le Campanier sort dans la neige, arme une fronde et abat le cavalier avant de le dévaliser.
Le cheval, après avoir voulu défendre son maître s'enfuit dans le brouillard. Il reviendra hanter les lieux du crime puis le village pour chercher à avertir les habitants du drame qui a eu lieu.
Le ton mystérieux, quasi fantastique est donné.
Autour du couple de héros, Renée Faure et Roger Pigaut, on retrouve tout un ensemble de figures familières du cinéma français des années 40, Fernand Ledoux, Marcel Peres, Madeleine Robinson...
Dans une étonnante scène de bal, une danse folklorique est montrée. Fernand Ledoux se lance dans la danse avec une étonnante et amusante vieille femme qui semble plus que centenaire. Elle est cependant loin d'être une vieille habitante du cru puisqu'il s'agit du comique Sinoël, qui donne ainsi la seule note amusante - et singulière - de l'histoire.
Se gelant sans doute trop dans les paysages hivernaux, brouillard, vent et neige semblant s'en donner à coeur joie, l'équipe ira tourner en studios à Paris, les scènes d'intérieur.
Le film est l'adaptation d'un roman de Claude Boncompain, Le Cavalier de Riouclare, écrit en 1943.
Intemporel, il dégage une grande poésie grâce à son atmosphère étrange et à ses personnages atypiques, le tout servi par les beaux dialogues de Jacques Prévert.
critique de L'assassinat du père Noël :
https://www.senscritique.com/film/L_Assassinat_du_Pere_Noel/critique/105842294