Il ne faut pas s’attendre à des miracles lorsqu’on se confronte à un monument comme Spiderman et son adaptation à l’écran : de la même façon qu’avec Batman, tout auteur y laisse des plumes, et s’il parvient à y insuffler un peu de sa vision, le cahier des charges d’une telle production est de toute façon assez inhibant.
C’est clairement le cas pour cette trilogie, à qui j’accorde le mérite d’une deuxième vision accompagné de la nouvelle génération grâce à un souvenir plutôt agréable.
Teenage movie avant tout, Spiderman décline toute la panoplie attendue du genre : Peter Parker en loser à qui on fait des croche-pieds à la cantine, qui loupe son bus et se soumet aux brutes qui règnent en despotes tout en aimant en secret une Kirsten Dunst qui a n’a pas oublié son décolleté, mais bien son soutien-gorge les jours de pluie. Et qui sait embrasser en toutes circonstances.
Si la mythologie fonctionne à plein régime sur la naissance du héros et les responsabilités qui en découlent, les meurtres fondateurs et les renoncements à venir, Sam Raimi paie son tribut au comic originel, et ce dès le sympathique générique. En découle une esthétique un peu douteuse, particulièrement chez le bouffon vert qu’on croirait échappé d’un épisode des power rangers, et qui pique franchement les yeux. Il semble qu’il faille en passer par là, se dit-on à l’époque, avant que n’arrive enfin un méchant à la hauteur en la personne du Joker chez Nolan.
Cet opus a deux mérites. Le premier dans la tonalité avec laquelle il aborde les origines du héros. En approfondissant la construction fragile et hésitante de sa figure, le récit rend attachant un personnage qu’on voit davantage sans son costume qu’à l’œuvre en tant que mythe. Le premier costume low-cost, les séances artisanales de dessin, les entrainements, la difficulté à subvenir à ses besoins et se confronter aux sacrifices donne un peu de chair et épaissit l’ensemble.
Le second réside dans les scènes de voltige. Outre de beaux mouvements de caméras et des combats un peu trop inspirés par le récent et structurant Matrix, les décors d’impasses et de blocs occasionnent de belles prises de vues, dont une séquence (celle des retrouvailles avec le meurtrier de l’oncle) qui rappelle l’esthétique fascinante de Blade Runner. Dès le départ, la mise à l’horizontale d’une façade qu’agrippe l’homme araignée renouvelle la vision de la ville, ici exploitée à plein régime, New York comme aire de jeu où les rues défilent au gré de la souplesse des toiles qui s’y tissent. A elles-seules, ces séquences de ballet urbain font le charme indéniable du film, et, alliées à la trempe d’un personnage émouvant incarné avec justesse par Tobey Maguire, excusent les faiblesses inhérentes à son budget et ses ambitions.