Je fais parti des gaulois qui n'ont pas apprécié Spider-man Into the Spider-verse. Les retours et la posture d’œuvre déjà culte m'a fait douter, mais j'ai beau avoir revu le film avant Spider-man: Across the Spider-Verse, je n'aime pas Spider-man Into the Spider-verse comme beaucoup le voudraient. La faute à une impression de fausse modernité dans l'écriture du scénario, cherchant à proposer quelque chose d'innovant autour de Spider-man, en se moquant par moment du fait d'être trop banal pour finalement faire exactement comme l'originale... je ne vais pas tant paraphraser ce que j'ai pu dire à l'époque quand j'ai écris ma critique, même si je relativiserais certains points, elle résume très bien ce que je pense encore du film aujourd'hui. Cependant, si je pouvais résumer mon avis sur Into the Spider-Verse, c'est que j'aurais voulu plus de Miles Morales, et moins de Peter Parker. Je voyais un grand potentiel (surtout en fin de film avec l'accomplissement du personnage de Miles) qui n'attendais qu'à se concrétiser dans une bonne suite. Heureusement, je suis assez ouvert d'esprit pour savoir que, malgré qu'on apprécie moyennement un film, cela ne veut pas forcément dire que les suites seront tout aussi moyenne, et qu'au contraire, parfois, elles peuvent apporter des choses vraiment sympathiques. Du coup est ce que cette suite a su me réconcilier avec la franchise...


D'entré le jeu, le film annonce la couleur: le film est dense, sportif, éreintant, et franchement éprouvant. La scène d'introduction de la vie de Gwen Stacy est à la fois très inventive dans sa réalisation, mais à la fois, laisse prévoir les soucis que je vais rencontrer par la suite. Dès l'arrivé du vautour de l'univers, Léonard de Vinci, le film accumule les détails et changements de style à l'écran sur un même plan, qu'à un moment je sature, au point de ne pas pouvoir de l'action. Si l'animation est magnifique et fascinante, tant elle arrive à varier tellement de style dans un seul long métrage, le film en lui même est indigeste tant tout va toujours trop vite. Cela se voit notamment dans l'animation des personnages où, entre le premier et second film, c'est le jour et la nuit. Le premier film avait dans ses réalisateurs Peter Ramsey, le réalisateur du film Dreamworks Les 5 Légendes, un film qui avait su démontrer l'amour et le talent de son réalisateur vis-à-vis de la représentation du corps en apesanteur, avec tout le travail sur Jack Frost, sur comment son corps pouvait être influencé par les courants d'air, ou encore sur le temps. On ressentait ce travail sur le premier film avec les scènes où Spider-Man semble comme en apesanteur, et notamment sur la scène la plus iconique du premier film, où il saute d'un building avec tout un montage alterné sur sa métamorphose physique et mentale en Spider-Man. Dans Across the Spider-verse, on va surtout employé une 2D et un tempo dynamique qui ne permet pas permettre une iconisation de son personnage principale autrement que par des ralentis qui te coupent presque de l'action. Il n'est plus question de prendre son temps, de profiter du travail sur l'animation rendant hommage aux différentes étapes d'animation 2D et 3D, mais de tout recevoir d'une seul traite. Le choix est compréhensible par rapport au thème même du film, qui se veut comme une véritable course poursuite entre son personnage et l’icône de Spider-Man qui l'empêche d'être qui il est vraiment, mais cela ne permet plus d'iconiser les scènes et de les rendre marquante. Il y a bel et bien des scènes qui restent marquantes, mais le soucis étant qu'on aurait pu en avoir beaucoup plus si le film avait pris le temps de rendre lisible son image. Une chose qui reste indéniablement bien en permanence, c'est la musique.


Chose que j'apprécie dans ce film, et que j’appréciai moyennement dans le premier, c'est le traitement des personnages qui pouvait se résumer par moment à de la vanne. Ici chacun va pouvoir avoir un développement poussé, et même si l'on va retrouver des personnages qui ont pour seul fonction d'être une vanne, cela sera surtout des personnages figurants qui n'auront même pas dix secondes d'écran de film. J'adore tout particulièrement le traitement de la tâche et son évolution, que je trouve fascinante, durant tout le film. On a beau avoir de l'action en permanence, on arrive tout de même à trouver le temps de développer le personnage de Gwen Stacy et de Miles Morales, et on apprend à les comprendre... chose que je regretterais sur le personnage de Miguel O'Hara. Son personnage a trop tendance à tendre dans une caricature de ce que pouvait être le Caïd dans le premier film, dans une forme de méchanceté pour de la méchanceté, teinté d'une backstory un peu pathos. Mais plus que l'écriture même du personnage, ce sont ses intentions qui me posent problème, et qui souligne l'un des problèmes majeurs du film.

Miguel O'Hara veut arrêter Miles Morales parce qu'il bouleverserait le multiverse en voulant sauver son père, parce que tous les Spider-Man n'ont pas eu à voir la mort d'un oncle ou d'un proche pour devenir Spider-man, mais de deux personnes qui l'apprendrait qu'on ne peut pas sauver tout le monde. Pourquoi ? Sans doute pour souligner le caractère absurde de l'ambition de O'Hara qui sera remis en cause dans le film suivant... sauf qu'on n'est pas encore au film suivant. Pourquoi cette fixette sur les capitaines de polices qui est totalement fausse ? Miles a vu Peter Parker et son oncle mourir, ça fait déjà deux morts, vous voulez buter combien de personnes devant ses yeux pour qu'il devienne réellement Spider-Man ? Il n'a plus le droit d'exister dans son monde parce que ça serait un "paradoxe"... sauf que c'est son monde, on revient littéralement à la morale du premier film disant qu'il n'y a pas qu'un Spider-Man et "qu'on peut tous être Spider-Man". Le soucis étant que, comme il est dit dans le film, chaque Terre est autonome et, même si elles suivent une même logique, chacune a sa lecture du mythe de Spider-man sans que les autres univers en ait à être en danger. La chose est d'autant plus flagrante lorsque l'on met en scène le Spider-man de la série animé Spectacular Spider-man pour dire à quel point c'est important qu'un Spider-Man ait à voir un mort autre que son oncle pour comprendre l'importance de sauver une vie plutôt qu'une autre... il est où le capitaine mort dans Spectacular Spider-Man ? Même équivalent, il n'y en a pas, pourtant le multivers avait l'air de se porter bien avant que la saga arrive, et ce n'est pas la seule version à ne pas avoir cela. On en parle de la jeune série spider-man et ses amis extraordinaires (qui est vraiment sympa d'ailleurs) ? Kit à sous entendre que l'on rappelle tous les spider-man, à accumuler les clin d’œil jusqu'à mettre en scène le vautour de Spiderman Homecoming ou l'épicière de Venom, pourquoi pas parler de leurs backstory, et voir que tous les Spider-Man ont appris cette leçon sans nécessairement suivre la même route. Comment cela se fait que certains aient droit de ne pas voir spécifiquement un capitaine ou un proche qui meurt pour qu'ils comprennent la même leçon ? Mais soit, disons que nous ne connaissons rien à Spider-Man, et qu'effectivement ce soit vrai. Imaginons que l'on tombe sur quelqu'un qui ne connait rien à Spider-Man, qui n'a vu aucun film Spider-Man, avec l'étendu des possibilités montrés dans le film (avec spider-man Lego, Spider-man handicapé, Spider-man indien, Spider-man lego, Spider-man 2099 névrosé, Spider-chat, Spider-dinosaure...), comment voulez vous qu'on puisse croire cinq minutes qu'aucun Spider-Man n'ait compris que l'on ne peut pas sauver tout le monde autrement qu'en voyant un proche mourir ? Comment ça se fait qu'il vaille attendre 2h de film avant de voir Gwen ENFIN comprendre ce qu'au moins un Spider-Man a dû forcément vivre avant Miles ?

Le film s'embourbe dans une volonté dicter ce que les autres œuvres Spider-Man ont à raconter, et à vouloir résumer tout une icône en pop culture en un seul film, créant des incohérences. Par moment, j'ai un peu l'impression de voir les scénaristes en mode Dwayne "The Rock" Johnson nous promettre un bouleversement de la hiérarchie de pouvoir du DCU avec Black Adam. On peut comparer avec Everything Everywhere all at once, un film qui traite du multivers, où on avait aussi des entorses aux règles sur le voyage dans le multivers, avec le personnage principale qui a la capacité d'avoir les aptitudes qu'elle souhaite en faisant des choses sans forcément réfléchir à pourquoi. Là aussi, le montage et la réalisation se veut assez rapide et énergique pour qu'on se s'attarde sur des détails comme "comment elle pouvait savoir qu'elle pouvait débloquer les aptitudes utiles en s'encaissant une bouteille entière de soda sans s'arrêter ?". La chose fonctionne car cela n'atteint pas la logique même du film et sa raison d'être. Le scénario de Everything Everywhere all at once ne se repose pas sur comment Evelyn arrive à voyager d'elle-même dans le Multivers, mais plus sur la relation qu'elle entretient avec sa fille qui, de par ses dégradations, va pour mettre en danger le multivers. Seulement, pour Across the Spider-verse, tout le scénario se base par rapport à une franchise inscrite dans le patrimoine, mais aussi sur un premier film qui avait déjà donné des bases qui contredisent ce qui est dit dans ce nouveau film. Je pense que ce n'est pas tant un problème de surenchère, qu'une influence beaucoup trop prononcé du premier film.


Par moment, j'ai l'impression que Across the Spider-verse cherche à reproduire le premier film. Que ce soit à travers le personnage de Miguel O'Hara qui reprend trait pour trait les caractéristiques du Caïd, l'évolution de Miles qui n'est pas encore considéré comme un Spider-Man (le faisant avoir une régression dans son développement car il doit encore prouver qu'il est un Spider-Man qui trace sa propre route), le fait qu'il est remis en question par les Spider-Man dans le QG de Spider-Man (avec une mise en scène ronde comme dans le premier film),... le film cherche à se justifier d'exister en essayant, de manière laborieuse et poussive, d'avoir un propos que nous avions déjà dans le premier film. On a toute l'exposition d'une théorie sur les univers parallèles assimilable à un continuum espace-temps linéaire où l'on ne peut pas modifier ce qui est déjà écrit, sous peine de détruire l'univers à cause d'un paradoxe. Sauf qu'il y a un problème qui vous hantera durant tout le film

ça fait depuis maintenant deux films, sans compter No Way Home, que t'as des Spider-Man qui squattent des univers qui ne sont pas les leurs, à se taper la discute avec des personnages qui sont pas de leurs dimensions, et à influer les actions qui se déroulent dans des univers qui ne sont pas les leurs. Pourquoi ça dérangerait que quand c'est Miles ? Genre O'Hara créé une squad pour voyager à travers les univers et mettre en danger d'autres Spider-Man à l'image de Gwen dans la scène d'introduction du film, et lui ça passe ? Sans doute parce que la véritable origine de ces bouleversements est autre, que c'est La Tâche ou même autre chose, et qu'il va être question de faire prendre conscience de cela à Miguel O'Hara dans le prochain film... mais on est toujours pas dans le prochain film, on fait comment pour justifier ce film ? Le problème étant que le paradoxe temporel, l'élément perturbateur à l'origine même du film, semble être si opportuniste et artificiel, que je ne crois plus au récit qui, au final, ne fait que poser des questions, tout en se dédouanant de ne pas être le film qui doit donner les réponses.

Rajouté au fait que le film semble suivre la même histoire que dans le premier film, je n'ai plus que l'impression de revoir le même film, avec une réalisation éprouvante tant elle part dans tous les sens, sans jamais nous laisser respirer, et une logique qui ne fonctionne pas vraiment. J'ai l'impression qu'il faut attendre le prochain film pour pleinement dire que le film est logique ou pas. Il y avait une phase, dans New Generation ou même dans d'autres films comme Harry Potter et l'ordre du phoenix (Avec Albus Dumbledore qui délaisse Harry parce que "je pensais te protéger"), où le personnage principal est confronté à une situation injuste parce que les autres personnages ont mis leurs neurones sur stop. C'est récurrent, c'est frustrant, mais cela amène une forme de magie, qui justifie cette frustration, lorsque le héros réussit à passer outre cette situation et arrive à expliquer aux autres qu'ils ont tord. Je trouve que ce film n'est constitué qu'une immense phase où tout le monde est con, où on subit les raisonnements illogiques que l'on peut remettre en question dès la première heure du film, et où on n'a même pas le plaisir d'avoir cette connerie pleinement remise en question. Malgré un très beau final, avec beaucoup de malice, qui redonne de l'espoir en un prochain film plus cohérent, je n'arrive pas à ne pas ressortir frustré et déçu par ce film qui n'arrive pas totalement à me réconcilier avec la saga. Il n'empêche que, même si je préfère l'expérience vécu lors de ma séance de New Generation, je préfère Across the Spider-verse dans la manière qu'il a de me faire aimer ses personnages, et à me donner à réfléchir. Plus qu'à espérer que la suite puisse me convaincre.


10,5/20


N’hésitez pas à partager votre avis et le défendre, qu'il soit objectif ou non. De mon côté, je le respecterai s'il est en désaccord avec le miens, mais je le respecterai encore plus si vous, de votre côté, vous respectez mon avis.

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le 2 juin 2023

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Youdidi

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