[Spoilerz inside]
Je m'étais barricadé pendant des mois en attendant de pouvoir découvrir cet épisode VII tant redouté, me refusant même à zieuter casting, teaser et bandes-annonces, de peur qu'elles n'en dévoilent trop. Ayant eu d'assez bons retours depuis sa sortie ciné, je m'engageais donc serein et plein d'espoir, déterminé à passer un très bon moment et surtout curieux de voir comment J.J. Abrams s'est dépatouillé pour s'approprier cet univers singulier et pour l'approfondir ; comment allait-il apporter sa pierre à l'édifice. Mais si j'ai effectivement passé un très bon moment, surtout durant la première partie du film qui a été un kiff (relatif) — la nostalgie a plutôt bien fonctionné au départ — j'ai vite réalisé, médusé, que je regardais un film culte de 1977 que je connais par cœur...
Car Le réveil de la force tient plus du reboot que de la suite et c'est incontestable ; il semblerait qu'Abrams se soit contenté de reproduire quasiment à l'identique la trame de l'épisode IV, scénaristiquement, visuellement... jusqu'à insérer certains plans qu'on jurerait avoir déjà vus dans Un nouvel espoir. Il y a bien sûr de nouveaux héros, mais la différence n'est que générationnelle : leurs profils sont inchangés et semblables en tous points à l'exception de Finn, Stormtroopers doté d'un libre arbitre qui tourne le dos à l'Empire (le Premier Ordre pardon) car refusant de tuer gratuitement. L'épopée de nos vieux héros préférés passant le flambeau à une nouvelle génération aurait pu être grandiose si l'ensemble n'avait pas été qu'un simple plagiat et je vois mal l'intérêt de dépoussiérer un film culte en y apportant du rien du tout. Il faut être honnête, on a la désagréable impression de regarder l'œuvrette d'un fan qui a peur de se brûler en touchant quelque chose qui le dépasse. Un fan sans idées, qui n'a pas jamais eu les épaules ni les ingrédients pour prétendre apporter quelque chose à l'univers fou de Star Wars et si ça n'avait été que ça, l'adepte que je suis aurait pu rester impassible…
Repenser après coup au Réveil de la force me rend aussi nerveux que Kylo Ren et le simulacre n'était pas suffisant. Il a donc fallu rajouter une bonne dose d'incohérences, d'invraisemblances, de facilités scénaristiques effarantes… Comment expliquer que la mort de mon personnage préféré de la saga se soit passée d'une façon aussi banale, simpliste, expéditive ? Et prévisible en plus. Sans un seul hommage ? Ce mec était le meilleur, donnez-lui le respect qu'il mérite ! Et Chewbacca qui s'en branle, vraiment ? Le wookie fait son deuil en trois minutes mais devrait juste être anéanti et désespéré. Comment est-ce possible que miss Rey, qui découvre à peine son nouveau pouvoir, soit déjà en mesure d'avoir recours à la persuasion, sache déjà manier le sabre laser comme une Jedi accomplie et qu'elle parvienne, en deux minutes, à botter le cul de Kylo Ren, ancien disciple de Luke Skywalker et responsable de l'anéantissement de l'Ordre créé par ce dernier… Alors oui on sait, la Force est très présente en elle mais rappelons que Luke a mis un temps considérable à s'entrainer avec Yoda pour arriver à un résultat équivalent ! Concernant Ben Solo / Kylo Ren : il a beau être l'enculé fautif de l'extermination des disciples de Luke, il n'empêche qu'il a le charisme d'une huitre et qu'il n'aurait jamais dû retirer son casque. Le Premier Ordre parlons-en, que ce soit Hux ou bien Snoke, ils n'impressionnent pas le moins du monde, ne marquent pas les esprits, surtout le jeune général "nazi" qui est juste à des années-lumière du Grand Moff terrifiant et emblématique, le Seigneur Wilhuff Tarkan et son règne par la peur...
Comment se fait-il que la Starkiller base, beaucoup plus imposante et redoutable que la Death Star, se fasse détruire à vitesse grand V sans aucun effort et par un nombre dérisoire de X-Wings en plus, le tout sans aide de la Force contrairement à l'épisode IV ? C'est grotesque. La bataille finale est beaucoup trop vite expédiée. N'y a-t-il pas de célébration à faire après sa destruction ? Et les planètes annihilées n'avaient-elles aucune histoire ? Mais où est cette émotion d'assister au massacre d'autant de vies innocentes ? Même la mort de Cotillard dans Batman Rises paraît plus poignante... Pourquoi est-ce que le capitaine Phasma n'apparait que pour se faire victimiser ? Elle est aussi utile que la générale Leia dans le film. Le fan service c'est du bonus, il aurait fallu bétonner le scénario, développer une intrigue crédible, cohérente avec de vrais enjeux, autre que la simple recherche de Luke dont on ne connait même pas la raison au final. Le passage vers Disney se ressent lors de certaines scènes, dans le mauvais sens mais on s'y attendait. Globalement, Le réveil de la force s'apparente à une série dérivée ou à une histoire annexe, qui n'aurait pas dû être numérotée comme un opus à part entière. Rien n'est marquant, aucune scène ne sort vraiment du lot, pas même celle de Solo avec son fils... Inutile d'évoquer cette séquence finale qui est du pur fan service insipide. Voir la tronche de Luke à la fin n'apporte rien et je m'arrêterai ici.
Pourtant vous constaterez que j'ai tout de même mis la moyenne au film car non, tout n'est pas à jeter. Certains plans sont somptueux, la mise en scène est plutôt bonne et la réalisation est aux petits oignons. La forte dose d'effets spéciaux à l’ancienne (les décors et les accessoires) au détriment du tout numérique est bienvenue. Rey (Daisy Ridley) est assez démente comme figure et j'ai trouvé John Boyega (Finn) plutôt bon dans son rôle. La présence d'Harrison Ford et de Carrie Fisher renforce un casting un peu faiblard tandis qu'Oscar Isaac campe bien le personnage de Poe Dameron, aka le meilleur pilote de l'Allian… enfin, de la Résistance. Côté score, la musique n'est pas spécialement marquante : c'est du John Williams en mode automatique. Le réveil de la force n'est pas un film si désagréable à suivre. Mais les vrais connaisseurs de SW ne peuvent juste pas aimer une œuvrette qui bafoue son univers et ses personnages. J'en attendais quand même autre chose et c'est assez préoccupant pour la suite…
Les fans de la première trilogie risque d’être déçus, ce n'est pas obligatoirement ce qu'ils attendent - Mark Hamill