Il y a deux ans, Jar Jar Abrams ressuscitait la saga Star Wars au cinéma et réalisait avec son Réveil de la Farce un remake en bonnet difforme du film original. Une proposition de cinéma captivante, qui je l'avoue ne me parle pas franchement, mais voilà, en bon pigeon que je suis, cela ne m'a pas empêché d'en attendre la suite, puisque confiée à quelqu'un d'autre que l'ami Abrams. J'avais donc reporté tous mes espoirs sur ce huitième volet. Las... Encore une fois, rien ne va.
Là où Abrams se reposait paresseusement et cyniquement sur la nostalgie de la trilogie originale sans prise de risque aucune, Rian Johnson décide lui de proposer un peu de neuf et surtout de se permettre quelques audaces - ce qui est tout à son honneur. Sauf que ça ne marche pas. Pas plus que le précédent film ce huitième épisode ne retrouve la magie des films de George Lucas. Comme son prédécesseur, le film n'a aucune âme ni sensibilité aucune et ne m'a procuré aucune émotion. La mise en scène de Johnson est propre, parfois efficace, mais sans fulgurance, et au service d'un scénario vraiment pas palpitant. Quelques pistes intéressantes surgissent ponctuellement, mais ne sont jamais exploitées, et le film reste finalement assez sagement dans les clous de la trilogie originale. Encore une fois... Si Rian Johnson n'est pas capable de s'émanciper de cet héritage pour la future trilogie qu'il va diriger, le bonhomme va vite tourner en rond.
Bref, tout ce spectacle ne m'a aucunement transporté. Si je ne me suis pas emmerdé, contrairement à Rogue One l'année dernière, je n'ai pas non plus vibré une seule fois. De trop rares scènes ont su m'intriguer, mais à chaque fois le souffle retombait. D'autant plus que John Williams s'avère une fois de plus en pilote automatique. Sa partition inintéressante sur l'épisode 7 m'avait déjà fait mal au cœur, mais, coquin que je suis, j'avais mis ça sur le compte de JJ Abrams, qui en bon tocard a forcément dû s'assurer que le compositeur ne lui propose pas de morceau trop réussi qui aurait juré avec son film. Mais le fait est que la bande-son est tout aussi faible dans Les Derniers Jedi... Il faut se rendre à l'évidence, le maestro a finalement perdu le feu sacré. Les films Star Wars sont désormais veufs des compositions hallucinantes de John Williams.
Mais ma plus grosse déception porte bien sur le personnage de Luke. Han Solo trépassé, les personnages de Luke et Leia ont logiquement gagné en présence, mais pour quel résultat ? Le traitement de Luke est catastrophique. Le héros du Retour du Jedi est devenu un pleutre faible et immature. De sa première scène (et son gag malvenu) à sa dernière scène (complètement ratée), le personnage est massacré du tout au tout. On ne peut pas reprocher à Johnson de ne pas avoir pris des risques sur ce point, mais je déteste ce qu'il a fait du personnage. Je ne blâme pas Mark Hamill, qui fait ce qu'il peut avec un tel rôle, mais ça ne va pas du tout.
Leia s'en tirerait elle presque mieux, sans cette scène improbable et hautement ridicule dans l'espace, qui ne devrait pas manquer de faire se déchirer les fans (je m'en délecte d'avance).
Non franchement, les anciens personnages ne sont pas respectés.
Et le problème, c'est que les nouveaux personnages ne sont clairement pas à la hauteur. Rey gagne certes en charisme, mais n'a toujours pas les épaules pour porter le film. Kylo Ren est toujours le même wannabe faible et frustré - même s'il aimerait bien faire croire le contraire. Hux, qui était déjà ridicule à rouler des yeux comme un demeuré dans le 7, est tout aussi couillon dans le 8, mais parce que maintenant volontairement ridiculisé par le réal. Phasma, qui avait elle perdu toute dignité dès sa première apparition, tente maintenant de se racheter une crédibilité (j'ai bien dit tente). Quant à Snoke, je me passerai de commentaire. Et sa garde prétorienne semble sortie de Doctor Who plus que de Star Wars, mais soit. Finn jouit lui toujours du charisme d'un gungan, et se paye désormais une acolyte aussi lourdingue que lui. En plus de se farcir l'arc scénaristique le plus faible du film. Le seul personnage à vraiment gagner en charisme et en intérêt est celui de Poe, interprété par Oscar Isaac. Et fort heureusement, son temps de présence est significativement augmenté. L'une des bonnes surprises de ce film.
Parce qu'il y a quelques bonnes choses dans le film, oui. La bataille d'ouverture, plutôt réussie. Le bestiaire, assez sympa (oui oui, même les Porgs). Quelques plans pas dégueus par-ci par-là. Deux ou trois bonnes idées. Quelques vaisseaux très classes. Certaines interventions de BB-8 amusantes. Et heu... je crois que c'est tout. Je n'ai pas trouvé grand chose à me mettre sous la dent, en fait. Je suis franchement déçu. J'aime beaucoup l'univers de Star Wars, qui est l'une des sagas fétiches de mon enfance, et j'attendais beaucoup de cette postlogie. Mais après deux films ratés, il va falloir que je me fasse une raison.
Enfin voilà. Et je ne sais pas ce qui me déprime le plus maintenant. De voir Abrams reprendre le flambeau pour l'épisode IX ? De savoir Johnson aux commandes de la prochaine trilogie ? D'attendre un spin-off sur Han Solo dont le seul attrait (le duo Lord & Miller) n'est plus ? D'assister impuissant à la marvelisation sans vergogne des films Star Wars ? De réaliser que Disney est en train de démystifier ma saga d'enfance ? Dur à dire.
Ce que je sais en revanche, c'est qu'à ce rythme-là, ses détracteurs vont vite être amenés à réhabiliter la prélogie. Et réaliser que, s'ils avaient des défauts, les films de Lucas avaient aussi une âme.