Je n'avais pas beaucoup aimé Le Réveil de la Force. En bref, je l'avais trouvé creux, malgré de bonnes idées (voir ma critique pour plus de détails).
J'ai par contre trouvé Les Derniers Jedi pas mal du tout (j'ai hésité à mettre 8). L'histoire est plus originale, recherchée et inattendue, bien que le film se calque sur le scénario de l'Empire contre-attaque : fuite des Rebelles d'un coté, formation de l'apprenti sur une planète reculée de l'autre.
Au niveau du fan-service et du marketing, j'ai trouvé ça équilibré. La présence de Yoda se justifie et est bienvenue (même s'il était bizarrement foutu). Les Porgs ne sont pas envahissants (enfin, ils le sont dans une certaine mesure pour nos héros), et leur mignonitude est un plaisir coupable. La scène du barbecue de Chewie m'a par contre mis mal à l'aise à ce niveau.
Maintenant, plusieurs questions se posaient à la fin du Réveil de la Force, et quatre n'ont pas trouvé leur réponse dans l'univers étendu (et ce n'est déjà pas idéal de se reposer sur l'univers étendu pour ce genre de choses) : Que s'est-il passé entre Kylo Ren et Luke ? Qui est Snoke ? Qui sont les parents de Rey ? Comment Maz est-elle entrée en possession du sabre d'Anakin ?
Seule la première a trouvé une réponse, quant aux autres, j'espère sincèrement qu'on aura autre chose dans l'épisode suivant : que les parents de Rey aient été des ferrailleurs peu scrupuleux est incohérent avec la réaction de Kylo dans Le Réveil de la Force ("Toi...?" edit : à ce propos j'ai un doute, c'était peut-être dans la novélisation bien pourrie) et le flashback du vaisseau décollant (toujours dans le VII) ; et concernant Snoke, qu'il ne soit qu'un type méchant puissant dans la Force, sorti de nulle part, n'est pas satisfaisant.
Parlons de la patte Disney. Elle est bien présente mais ne m'a pas trop gêné. Je pense notamment à l'humour dès la première scène, ou même à l'un des derniers plans avec le gosse et son balai regardant les étoiles - ça, ça m'a un peu agacé, ça m'aurait fait le même effet de voir une pub pour gamins : "toi aussi, achète la bague de la Résistance en deviens un vrai Jedi !".
On est loin de la noirceur des romans ou de Rogue One, mais la saga principale vise tous les publics et je peux le comprendre (même si vraiment, ce gamin et son balai étaient de trop - et bon sang, il avait zéro charisme avec son regard de veau mort).
Pour l'humour, je préférais en tous cas l'approche prélogique, comme le "Quel manque de civilité !" d'Obi-Wan (non, j'aime pas "d'éducation"), plus pince-sans-rire, plus élégant, plus adulte.
Mais je dois dire que voir Luke balancer son sabre comme un déchet après deux ans d'attente du spectateur, ou s'épousseter légèrement l'épaule après s'être fait (apparemment) bombarder fut hilarant, et dans le bon sens (edit : en tous cas au premier visionnage, ensuite ça ma laissé apathique).
Concernant cette dernière scène, j'ai été déçu. Je m'attendais à le voir détruire tous les marcheurs avant un combat épique et chorégraphié, et ce que j'ai eu n'a pas été à la hauteur. Sa disparition aussi est sujette à questionnement, même si on peut imaginer qu'un tel acte doit consommer pas mal de mana et de PV, dans son cas tout ce qu'il avait apparemment. C'est certes moins fan-service, mais aussi un peu frustrant.
D'un autre coté, cette approche plus recherchée, montrant ce qu'il faut pour servir l'histoire et pas ce que le fan veut est vraiment louable ; on le voit beaucoup dans Star Wars Rebels, et j'ai repensé à mon irritation initiale lors du duel entre Obi-Wan et Dark Maul, qui au final était un vrai grand moment artistique, de part son inspiration des films de samouraïs et son déroulement : Obi-Wan pare le mouvement qui a été fatal à Qui-Gon.
Je m'éloigne du sujet de cette critique, mais ça reflète un état d'esprit que j'aime beaucoup actuellement dans la franchise : montrer ce qu'il faut, ce qui demande du courage.
https://www.youtube.com/watch?v=jeG215-yu-k
Mais soyons clairs, le film est une vraie réussite visuelle. D'ailleurs sur la forme en général, c'est très bon, y compris la B.O. grâce à la reprise d'anciens thèmes (niveau innovation musicale, ce n'est pas encore ça).
La grandeur qui manquait à la réalisation de Jiji est bien là, quitte à donner un aspect plus "artificiel" au film. Cette "artificialisation" touche aussi les acteurs, Daisy Ridley en particulier, plus musclée et maquillé/photoshopée.
Un truc aussi m'a frappé, c'est l'utilisation de codes d'anime japonais, par exemple au moment de la coupure son, ou celui où Kylo fonce sur Luke et tente de le couper en deux. Ça faisait très manga, et cette énième originalité m'a elle aussi plu. Décidément, le fait que Jiji reprenne les rennes pour le IX m'inquiète un peu après tant de paillettes.
Sur le fond, c'est toujours du bon, éternelle réflexion sur le bien, le mal, l'équilibre, même si la postlogie manque hélas de philosophie politique et ne se concentre que sur la nature humaine...
Un petit mot sur Carrie Fisher : je m'attendais à la voir mourir pendant tout le film, et sa "presque-mort" fut si rapide que j'ai eu du mal à me concentrer sur le film pendant les instants suivants, avant son retour (extrêmement stylé) dans le vaisseau. Au final, elle survit au film, ce qui est très étrange. Quoi qu'il en soit, elle crève l'écran.
J'ajouterai que j'ai trouvé cette scène extrêmement touchante, malgré les quolibets qu'elle s'attire. En effet, la scène peut paraître saugrenue, car on ne sait rien d'un supposé entraînement de Leia, et à ce moment Anakin n'aurait eu qu'à faire de même sur Mustafar plutôt que de péniblement (et vainement) se traîner. Mais ce n'est pas en contradiction avec l'usage de la Force dans cette trilogie, qui pourra (je l'espère) être expliqué ultérieurement. Je ne vais pas théoriser.
Simplement dire que cette scène était magnifique, car même si ce n'était pas prévu, la mort de Carrie Fisher sublime cette scène, qui revêt un aspect bien plus profond à mes yeux : les acteurs continuent à vivre à travers le cinéma ; le contexte, la mise en scène, la musique... Tout cela met en lumière cette forme d'immortalité, de résurrection.
Si l'actrice ne nous avait pas quitté avant la sortie du film, mon ressenti aurait peut-être été différent.
J'ai par contre détesté le personnage de Rose ; je ne l'appréciais déjà guère, jusqu'à ce qu'elle sauve Finn, personnage auquel je n'accroche pas beaucoup, mais qui s’apprêtait à vivre un vrai moment de gloire kamikaze qui l'aurait remonté dans mon estime, avec une mise en scène toujours au poil. Et là ce machin, avec sa tête de dictateur Nord-Coréen, fait tout capoter. C'est LE moment qui m'a fait inhaler tout le sel de Crait. Je veux qu'elle meure lentement, la bougresse.
Coté développement des personnages, c'est du coté de Poe que le film s'en sort le mieux. Le traitement réservé à Luke est clivant, mais je l'ai trouvé plausible et pas si original que ça : l'ancienne légende porteuse d'espoir qui se transforme en ermite dépressif, ça ne me semble pas si original (et l'originalité n'est pas une fin en soi). En tous cas j'ai bien aimé, d'autant que là, l'UE est tout indiqué pour nous apporter les détails de son évolution psychologique et de sa relation avec la Force. Ce qui me va.
Rey et Kylo ont une évolution très métaphysique, difficile de juger donc, car c'est sujet à interprétation.
Finn est le personnage maltraité de cette trilogie ; un type naît et grandit dans un régime totalitaire et devient l'un de ses agents les plus prometteurs mais fait défection au moment d'entrer en fonction. Il y a autre chose à faire avec ça qu'un comic relief ambulant entretenant une rivalité avec un méchant secondaire (qui apparemment va jouer les Kenny) manquant lui aussi de profondeur ; Hux et Phasma, tiens. Le potentiel de ces deux-là, avec celui de Finn... Leurs relations... Bref, tant pis, peut-être dans l'UE...
Quelque-chose me chiffonne dans tout ça : entre le début du Réveil de la Force et la fin des Derniers Jedi, il a du se passer deux semaines à tout casser. Ça, les utilisateurs de la Force pétés sans entrainement dans tous les coins, l'absence totale de politique (contexte impossible à comprendre sans avoir lu Liens du Sang et la trilogie Aftermath)... Autant de points faibles niveau scénario...
J'espère sincèrement que la suite (et fin) nous expliquera comment cette utilisation cheatée de la Force est possible... Et reviendra aussi sur Snoke. L'univers étendu peut certes se charger de ces "détails", mais encore une fois, c'est à éviter pour des éléments d'une telle importance dans la trame principale de la saga.
Une remarque sur le montage : la disparition de Rey après son combat contre Kylo Ren puis sa réapparition dans le Faucon sans aucun suivi intermédiaire est juste ridicule. Sa réplique à ce moment, en dézingant des chasseurs TIE "J'adore ça, wouhou!!" l'est tout autant, et ce type de répliques devrait être banni des Star Wars à tout jamais.
Et le dernier plan du Réveil de la Force semble avoir été... quelque peu retcon tout de même !
Pour les détails, je note aussi que la rencontre entre Poe et Rey, supposée hors-champ dans l'opus précédent (et même relatée dans la novélisation de celui-ci car présente dans les scènes coupées) a lieu de façon inattendue à la fin de ce film (en reprenant le dialogue original).
La rencontre en Rey et Luke n'est pas raccord avec la fin du VII...
Oh, et quitte à faire du fan-service poussif, pour la VF, autant redoubler l'hologramme culte de la jeune Leia pour gommer la traduction douteuse d'alors (au passage, la trilogie originale aurait besoin d'un bon redoublage).
Enfin, le gros écueil du scénario, c'est le refus de d'Holdo d'expliquer son plan. Ce refus est injustifié et mène, après la mutinerie de Poe et la trahison de Benicio, à la débâcle du dernier acte ; c'est un peu débile.
Mon avis est qu'il faudra attendre le dernier chapitre pour évaluer cette postlogie (même si Le Réveil de la Force restera franchement moyen quoi qu'il en soit).
Le vrai souci au final, c'est cette division en trois épisodes. Comme pour les autres époques, il faudrait au moins le double pour détailler une histoire ample et cohérente sans faux-pas (la prélogie aurait aussi gagné à commencer en -42, avec 10 ans d'écart entre chaque épisode).