Aux filles (et au fils) du temps
Mention : Sobrement touchant
L'histoire d'Alice Howland est singulière. La maladie qui la frappe est peu commune pour une femme de son âge, mais le combat qu'elle mène est très universel. Deux hantises lui viennent dans ce bouleversement. Alice est préoccupée par la soudaine fragilité de ses souvenirs. Elle prend conscience de leurs importances, et à quel point ils conduisent notre vie. La mémoire est quelque chose de fascinant et donne en partie un sens à nos vies. Le film transmet cela avec une grande justesse. Alice est tourmentée par la question de ce qu'il restera de son existence. Elle veux partir avec dignité, mais surtout en laissant l'image de celle qu'elle a toujours été. En somme, "Still Alice" pose la questions de ce qu'il subsiste après le trépas.
Julianne Moore nourrit parfaitement cette dimension profondément humaine du récit. Elle dirige avec parfaitement l'évolution fatidique de son personnage. Au départ Alice est une maman pétillante et rajeunie, mais aussi une professeur brillante. Progressivement Alice devient une mamie (littéralement d'ailleurs) désemparée, elle fait de plus en plus peine à voir.
La mise en scène évite de tomber dans le larmoyant et reste relativement sobre. Les décors et le son créent une ambiance feutrée qui n'est pas déplaisante. Le cadre visuel est toujours très délicat. Campus, foyer familial, maison de repos, tout est relativement rassurant et confiné. Les violons ne sont ni stridents ni lacrymales, mais chaperonnent le récit.
Le scénario est trop précisément orchestré, on sent les ficelles tirer chaque scène. Des scènes qui s'enchainent maladroitement et qui donnent un ensemble de récit très apprêté.
Autour du personnage de Julianne Moore, l'entourage est saisissant. Au second plan les rôles nourrissent le récit par leurs personnalités distinctes. Ils frisent tous le cliché, mais c'est un portrait relativement figuratif. Alec Baldwyn est au départ un mari absent qui deviendra carrément fuyant face à la maladie de sa femme. Au contraire de leur cadette (Kristen Stewart) qui revient peu à peu vers le nid familial dont elle s'était éloignée. Le dialogue qu'elle a avec sa mère, sur ses choix professionnels et sa vie d'artiste, est gavé de poncifs. Le Dr Alice Howland est d'un coup moins brillant qu'elle n'y paraît. Kristen Stewart n'est pas géniale, elle abuse encore de sa moue, mais elle a le beau rôle. Au contraire de sa sœur, l'ainée (Kate Bosworth) est très guindée. Elle se montre très proche de sa mère et plutôt avenante, pourtant elle semble garder une certaine distance, au contraire de Lydia (peut-être est-ce ça que le fil rouge du Scrabble raconte ?). La proximité entre Anna et sa mère se fait surtout dans leur ressemblance. On voit l'avenir de l'une dans le passé de l'autre et vice-versa. Alice et Lydia cherchent d'avantage à se comprendre et se soutenir. Enfin il y a le fils que toutes rêveraient d'avoir, Tom aka Hunter Parrish (Weeds) est classe, serviable et modeste.
Grâce à une certaine légèreté, "Still Alice" montre avec finesse une vie suspendue au temps. Récit émouvant entrainé par des ficelles qui, elles en revanche, manquent de finesse.
Note : 12 / 20