Criminally Strict

Quelle déception.
Comment ? Faut que j'argumente ? Ok.

Le projet laissait rêveur : Un Johnny Depp métamorphosé incarnant un parrain de la pègre de Boston des années 1980, des bandes annonces révélant violence et humour noir, Benedict Cumberbacht au casting, une "histoire vraie" que peu de gens (européens, en tout cas) connaissent... Tout était réuni pour un film original qui aurait pu, sans révolutionner le genre, raconter avec brio une histoire méconnue du crime américain.

Le premier gros problème, c'est le manque de dynamisme. On s'ennuie, la sauce ne prend pas. Je ne sais vraiment pas à quoi ça tient, et je vais tenter de le lier à l'un des points forts du film : le cadrage.
Les plans sont beaux, bien utilisés. Ils donnent un sentiment de claustrophobie lorsque la tension monte lors des trajets en voiture, deviennent des cartes postales ultra-détaillées lorsqu'il s'agit de délivrer un message fort. D'ailleurs, on peut noter l'obsession de Scott Cooper dans l'agencement du cadre. Rien ne dépasse, tout est bien rangé, très symétrique. On dépasse même ce que beaucoup appellent "classicisme" pour plonger dans la minutie la plus totale. Ce parti-pris aurait pu être intéressant, et marche très bien par moments. Sauf que le film peine à avoir un rythme, un souffle, au milieu de cette démarche millimétrée. Pas de fantaisies (c'est un comble pour un film avec Johnny Depp), pas de surprises... On s'ennuie un peu.
Et c'est particulièrement préjudiciable à un film de gangsters comme celui-ci, qui raconte, grosso modo, une histoire de corruption vue et revue. Du coup, il aurait fallu un peu plus que l'éternel "tiré d'une histoire vraie" pour nous accrocher.

Le casting fait le taff, mais tout est tellement poli (l'image et la mise en scène, pas les dialogues) que les potentiels peinent à s'affirmer. Mention spéciale pour Johnny Depp qui est, je dois bien l'avouer, plutôt très bon et sobre dans son rôle (il ferait presque penser à Jack Nicholson, le bougre). Dans l'ensemble, ça joue bien.
Mais c'est pareil pour le traitement de l'image sur les personnages. Les visages sont lissés à la perfection, ont quelque chose de rectiligne...c'est quand même le comble pour un film de gangsters.

Autre bémol, le scénario se disperse et, déjà que le film peine à nous embarquer avec son ambiance, les nombreuses digressions inutiles achèvent de le rendre hermétique (Toute la partie sur la pelote basque, notamment, est assez inutile.). C'est dommage, pour un film basé sur les relations entre les personnages, de ne pas parvenir à construire des bases solides pour ces relations, et de faire dans la surenchère dispensable.

Le film a quand même ses bons moments, parfois émouvants, parfois drôles, mais l'ensemble souffre d'un manque de souffle évident.
Un film dispensable, donc.