Beau regard
Premier regard sur un univers méconnu qui ne se contente pas de rabâcher des poncifs éculés. Suck my geek porte en effet un regard attentif et attendrissant, bien que sans compromis sur un...
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le 31 mai 2010
18 j'aime
En 2007, on m'avait fait voir une vidéo qui m'avait enthousiasmé et dont de nombreuses répliques ont tout de suite rejoint la liste des citations fréquemment employées parmi mon entourage alors limité : "c'est pas des films que j'ai vu, c'est des expériences que j'ai vécu", "Conan c'est une grosse pierre dans le jardin et on n'y touche pas", "je peux être féminine et poutrer du zombies", ... (aucune de ces phrases n'est dans le film au final).
Cette vidéo, c'était la preview d'un documentaire au titre plus que douteux, Suck my geek.
J'ai suffisamment de recul pour l'admette maintenant, j'étais à l'époque un ado pas du tout intégré, et, cherchant malgré tout à faire partie d'une communauté, c'est tout à fait naturellement que je cherchais à faire partie des geeks. Mais je n'en étais pas vraiment un, j'étais plutôt un aspirant geek, même si depuis ma plus jeune enfance beaucoup d'éléments semblaient m'orienter dans cette voie.
Et donc ce documentaire, il ne pouvait que me plaire, c'est comme s'il me disait "je te comprends", il me caressait dans le sens du poil tout en me gratifiant d'interviews exclusives de mes idoles : "ouaw il y a Sam Raimi, ouaw il y a Edgar Wright, ouaaaaaaw Kevin Smith qui explique comment il a connu Star wars !"
Mais plus récemment, en voyant les avis négatifs sur SensCritique, je me suis dit qu'en fait, Suck my geek n'était peut-être pas aussi bien que ça.
J’ai voulu voir ce que je penserais du film maintenant…
Ca ne fait pas partie du docu en tant que tel, mais je tiens déjà à évoquer la présentation qui le précède, avec un Yannick Dahan surexcité et assez insupportable, qui vante les mérites de la geekitude en dénigrant les autres catégories sociales (notamment par un "il y a pleins d’autres trucs biens pour les vieux sur les autres chaînes").
C’est paradoxal quand on voit que l’une des premières phrases du docu, c’est "Quand on est geeks, on a une ouverture d’esprit telle qu’on peut s’intéresser à n’importe quoi." L’ouverture d’esprit est aussi quelque chose que je prône, mais ce n’est pas vraiment le message que fait passer le reste du film malheureusement.
Dahan et d’autres veulent aussi plus ou moins faire comprendre que le geek, c’est le statut ultime dans la société. "Si après ça, vous n’avez pas envie de devenir un geek hardcore…" J’en doute un peu, quand on voit des intervenants comme ce programmeur qui avoue avoir passé 6 mois sans sortir de chez lui.
J’avais beau vouloir revoir le documentaire, j’ai eu une petite appréhension avant de le lancer ; c’est vrai qu’en y repensant, et ensuite en revoyant des extraits, Suck my geek renvoie une image négative de la communauté que ce film essaye de défendre, avec une sélection d’intervenants aux propos extrêmes. Il y a ce type qui dit que ses amies sont en png, et l’autre qui balance carrément que sans les films il serait dans un asile ou serait un serial killer… brrrr !
Le docu n’a pas vraiment de structure, on débute avec ce type qui énumère toutes les qualités qu’ont les geeks selon lui (dans un même temps, il dit que "quand on est geek, on se sert de sa Néo géo pocket comme réveil"), et soudainement on passe à une grosse énumération d’œuvres de l’univers geek, entrecoupée par des images de ces fanboys qui s’extasient à la simple évocation d’un nom ou d’un titre, "ahhhhh CONAN !".
Heureusement, sur 52mn, le documentaire comporte quand même quelques propos intéressants, comme cette analyse du message de Matrix : ce qui plaît au geek, c’est que le film présente leur culture alternative comme la réalité.
Et j’aime pas Kaamelott, mais décidément plus je vois Alexandre Astier, plus je me dis qu’il a l’air d’un type malin, et surtout ici le plus lucide vis-à-vis de la culture geek.
Heureusement aussi que certains des intervenants font mieux le pont entre le geek et l’humain normal, et n’ont pas l’air de malades.
Un truc qui m’avait plu à l’époque, c’était le plaisir de reconnaître des lieux et des intervenants, et aujourd’hui, je suis aussi amusé de voir qu’en 2007 déjà on parlait du Ant-man d’Edgar Wright, mais bon, ce n’est pas ça qui fait un bon documentaire.
J’avais aussi, à l’époque, trouvé les animations cool, surtout celle du générique du début… mais ils en abusent dans le reste du film : Bernard Werber parle de Terminator ? Allez, on lui incruste un œil bionique ! Kevin Smith parle de Ghost rider ? On place en bas de l’écran une animation débile avec un type sur une moto !
Et cette séquence animée où un type enfile divers t-shirts geeks, ok, mais qu’est-ce que ça fout là, au milieu de deux interviews ?
Suck my geek présente quelques personnes normales, fort heureusement, mais dans l’ensemble ce documentaire va vraiment à l’encontre de son intention de défendre la culture geek.
A sa sortie ce docu était perçu, par moi notamment, comme le porte-étendard de la communauté geek, mais en fait, je pense maintenant qu’il faudrait carrément un nouveau documentaire sur le sujet pour réparer les dégâts, un film qui nous ferait un peu moins passer pour des gros nazes.
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Créée
le 4 oct. 2014
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