Super-bourrés s’empare des codes du teen movie américain pour mieux les réviser en ancrant ledit genre dans un terroir du sud-ouest de la France : il fuit les rangs de l’école, lieu topique de la comédie française adolescente, s’intéresse moins à la soirée alcoolisée en elle-même qu’à sa préparation, ce qui permet de brosser le double portrait d’une part d’une ruralité rythmée par le travail des champs et la tranquillité de vie, d’autre part d’une amitié entre deux adolescents que l’avenir proche séparera – l’annonce nous en est faite dès les premières minutes, projetant Janus à Paris. Nous pensons, évidemment, aux adieux musicaux de Grease (Randal Kleiser, 1978), œuvre qui représentait déjà cette dernière tempête des émotions et des corps avant un calme lié à la vie professionnelle (« We go together »). Avec Vincent Moscato et Jean Lassalle en suppléments bonus, prototypes de la culture sudiste qui enseignent tantôt à la mairesse tantôt aux plus jeunes l’art de distiller et l’importance des premières cuites.
L’intelligence du film tient alors à la façon qu’il a de faire éclore avec simplicité le potentiel de ses personnages et des comédiens qui les interprètent : s’engager dans un cursus parisien, demeurer fidèle à l’exploitation de pruneaux paternelle sont deux voies que les adolescents choisissent naturellement, sans autre contrainte que la distance géographique qu’elles occasionneront sous peu. Bastien Milheau capte à merveille l’énergie d’un dernier temps de complicité et de mauvais coups partagés – contrebandiers tel le bandit Scarface, explicitement cité par la chanson de Giorgio Moroder –, crépuscule d’une insouciance avant l’inertie du monde des grands contre laquelle met en garde le caissier de la superette du coin ; sa mise en scène cultive ce dynamisme à l’aide d’un montage alerte et d’un sens du décalage comique – qui paraît quelquefois forcé. Une belle découverte.