Un film qui retrace l'histoire d'un groupe, NTM, à sa création en 1988, parti de Seine-Saint-Denis, pour une carrière qui débutera après leur premier concert au Zénith de Paris en 1992.
Une certaine critique sociale de la société de l'époque, avec un contexte d'émergence culturelle que l'on appelle le Hip-Hop, et qui voyage de son empreinte au sein de tous ces métros parisiens : l'expression d'un passage, parfois sauvage, mais aussi artistique, dessinés sur tous les murs de Paris, ces graffs, signés d'un tag, rythmés au son d'un beat, une musique aux basses profondes que scratche le DJ.
Tout un art, un style urbain, accompagné de ses danseurs, ses breakers, et de ses deux mecs et leur groupe, qui débarquent en fracturant la porte, jamais invités : Joey Starr (Théo Christine) et Kool Shen (Sandor Funtek), arrogants, prétentieux, et surtout provocateurs. Le rap comme seul moyen d'expression aux problèmes de banlieue, par des mots, des textes, toujours très percutants, une contre-culture qu'ils décrivent, un quotidien qu'ils dénoncent, une famille qu'ils s'inventent, quand celle qui existe manque parfois à leur cœur. Le tout sur fond d'affrontements de plus en plus violents entre la police et tous ses quartiers. Ils choisissent alors d'y répondre par la naissance de ce groupe, devenant ainsi parmi les précurseurs du rap français.
La réalisatrice, Audrey Estrougo, livre un retour sur la décennie des années 90, les événements de cette époque, n'épargnant aucune violence, pas même celle à l'intérieur de ce groupe, ou bien à l'arrivée de ces maisons de disques, qui comprennent qu'il faut s'intéresser à cette jeunesse bouillonnante des quartiers. Le rap comme un éventuel futur style, permettant pour eux un nouveau business, que ces grandes majors captent assez rapidement. C'est ainsi que Kool Shen et Joey Starr décident de tracer leur route, en se poussant l'un l'autre, une rage de vivre et d'exister. Cet esprit de compétition, être les meilleurs, sans jamais vraiment y croire, unis contre tous. Il fallait donc bien pour cela apprendre la rythmique, les studios, un parcours difficile pour certains. Un groupe sans discipline, ni éducation, tout deviner afin de trouver sa place parmi les blessures, la rencontre d'un destin, raconter les blocs. Cette autre école du mouvement en streetwear, et ce soleil qui s'enfuit devant le même gris des cités. Une traversée de l'Atlantique qui vient découvrir cette autre réalité, ces différences, son questionnement, toujours aussi bruyante, encore un effet de mode qui passera, mais qui semble pourtant faire ses pas. Une notoriété suivie d'un nom qui frappe, NTM (Nique Ta Mère). L'élégance ne sera jamais leur marque de fabrique, mais plutôt une politique d'un rap hardcore, qui dénonce les inégalités, les situations injustes que vivent tous ces jeunes banlieusards. Ce racisme qui en découle, espérant vivre cet ailleurs, la vision d'un rêve pour un monde meilleur, quelque chose qui deviendra le déclencheur d'un engagement commun, et ces brèves rencontres de courants musicaux, qui au fond ne seront pas si différents.
NTM deviendra ce groupe qui verra son ascension coïncider avec les émeutes et les tensions raciales du moment, un contexte qui connaîtra son caractère impératif à s'exprimer : ces révoltes qui explosent, et qu'on retrouve encore aujourd'hui, l'écho d'un mal-être grandissant, et qui prend des formes toujours plus inquiétantes de nos jours. Crier sa haine de la police, de la justice, une pratique qui incite aux troubles, une liberté dans un état de droit, cette ambivalence qui prête à réfléchir, quand elle ternit parfois le message. L'image d'une banlieue qui échappe à l'État, devant son échec et ses plans de rénovation urbaine, une situation qui ne cesse de s'aggraver, avec des causes qui deviennent à présent toujours plus nombreuses, et qui crée au final un ensemble où le bien comme le mal ne font plus qu'un.