Harper's bazar
Je ne sais plus du tout pourquoi ce sagouin de Pruneau a réussi à me refiler ce film la dernière fois que je suis passé chez lui, mais bon, du coup, j'étais tombé sur deux trois images assez...
Par
le 3 août 2012
103 j'aime
20
Retrouver Jessica Harper deux ans après sa prestation dans Phantom of the Paradise assure à Suspiria une continuité des plus légitimes entre ces deux univers malades.
On entre dans Suspiria comme dans un cauchemar à qui on aurait donné toute l’ampleur que le réveil filtre d’ordinaire. L’orage initial s’abat en trombe sur le spectateur et sa jeune candidate, prémices d’un déluge horrifique qui ne reculera devant aucun excès.
Chez Argento, tout flamboie : de la couleur des façades au mouvement des étoffes, de la musique synthétique aux susurrements anxiogènes, des mouvements latéraux aux ombres chinoises, l’osmose synesthésique est bien celle d’une écriture opératique.
On retiendra particulièrement l’unique faconde avec laquelle il filme l’architecture. Dès la première scène de meurtre, grandiose, qui voit une voute de verre s’effondrer sous le poids d’un corps, le réalisateur inféode les lieux aux arcanes du mal : corridors, portes aux courbures fascinantes de l’art nouveau, dessinent un labyrinthe expressionniste où chaque lucarne, chaque tenture est une étape nouvelle vers le cœur névralgique d’une horreur matriarcale dérobée à la vue.
On a beau proposer à l’initiée la libération par la danse, rien n’y fait : le corps, pris de vertige, drogué est rivé à ces lieux qui suppurent les asticots, et dont la piscine elle-même semble être la porte d’entrée vers des gouffres insondables. En écho à la claustrophobie croissante, les extérieurs ne sauvent pas plus les protagonistes, à l’image de cette exécution d’un aveugle perdu au sein d’une gigantesque place vide dont l’unique menace est la minérale façade néoclassique qui la domine.
Il est donc aisé de se laisser prendre la main et d’aller fureter du côté des sorcières, tant la magie des lieux fonctionne, nous rendant tolérants face à cette histoire qui reste un prétexte. Argento, ravi de ses effets, prend un malin plaisir à malmener les corps comme sa propre structure, et la destruction finale jubilatoire de tout le mobilier jusqu’à l’édifice lui-même est à l’image de son propos : une apocalypse échevelée dont on veut prolonger la dimension onirique, sans soucis du réveil.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Plastique et formaliste, Psychologique, Epouvante, Violence et Portrait de femme
Créée
le 27 mars 2015
Critique lue 4.1K fois
111 j'aime
6 commentaires
D'autres avis sur Suspiria
Je ne sais plus du tout pourquoi ce sagouin de Pruneau a réussi à me refiler ce film la dernière fois que je suis passé chez lui, mais bon, du coup, j'étais tombé sur deux trois images assez...
Par
le 3 août 2012
103 j'aime
20
Une putain de vache qui pisse ! Des litres d'eau glacée tombent sur le joli petit minois de Suzy Bannon en guise de cadeau de bienvenu dans ce Fribourg de carton-pâte, cette Allemagne...
le 6 août 2014
91 j'aime
13
Mais qu'est-ce que tu nous dis qu'il n'y a pas d'histoire, mais évidemment qu'il n'y a pas d'histoire ;), l'objectif est la peur dépouillée et un étrange mal-être par l'image et le son seuls. Deviner...
Par
le 21 mars 2014
82 j'aime
16
Du même critique
Cantine d’EuropaCorp, dans la file le long du buffet à volonté. Et donc, il prend sa bagnole, se venge et les descend tous. - D’accord, Luc. Je lance la production. On a de toute façon l’accord...
le 6 déc. 2014
773 j'aime
107
Il y a là un savoureux paradoxe : le film le plus attendu de l’année, pierre angulaire de la production 2019 et climax du dernier Festival de Cannes, est un chant nostalgique d’une singulière...
le 14 août 2019
714 j'aime
54
La lumière qui baigne la majorité des plans de Her est rassurante. Les intérieurs sont clairs, les dégagements spacieux. Les écrans vastes et discrets, intégrés dans un mobilier pastel. Plus de...
le 30 mars 2014
616 j'aime
53