Pica… chu(t)
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Cela s’appelle le pica, pathologie caractérisée par une altération du comportement alimentaire avec ingestion de substances ou d’objets non comestibles. Avec, évidemment, des conséquences directes sur l’organisme, des plus bénignes aux plus critiques. C’est cette pathologie, rare et encore mal comprise, que va développer Hunter (Haley Bennett, magnifique), femme au foyer bientôt maman qui mène une existence a priori parfaite : une jolie villa, un joli mari, un joli avenir tout tracé. Le tableau est idyllique, trop absolu bien sûr pour ne pas cacher derrière un mal-être carabiné. C’est d’ailleurs quand elle apprend qu’elle est enceinte qu’elle commence à avaler différents objets. D’abord une bille, ensuite une punaise, puis une pile…
Et c’est parce qu’elle ne contrôle absolument rien de sa vie (une belle-famille intrusive, des journées passées seule à faire le ménage ou à préparer le dîner, un mari lisse comme une gravure de mode, une maison design comme une prison dorée…) qu’Hunter semble, chaque jour, vouloir faire «quelque chose d’inattendu». À l’instar d’Esther dans Dans ma peau, Hunter décide de se «rebeller» contre son statut de femme (et de future mère) passive, et de laquelle on attend uniquement ce qu’on lui ordonne, en se réappropriant son corps et ses angoisses. Quitte à flirter avec l’extrême. Les raisons de la colère, évidentes mais jamais insistantes (quotidien sclérosé, solitude prononcée, devoir de reproduction…), offrent la lecture singulière d’une condition féminine sous emprise d’un système patriarcal, et de son brutal affranchissement.
Dans un style clinique mais élégant, et s’inspirant de l’histoire de sa propre grand-mère, Carlo Mirabella-Davis signe un premier long-métrage troublant qui, presque inévitablement, rappellera le meilleur de Cronenberg ou de Polanski (Répulsions et Rosemary’s baby en particulier). Dommage qu’un dernier acte, comme rajouté à la va-vite et alors que le film jouait jusque-là sur une forme de non-dit, développe maladroitement un autre niveau d’analyse (certes évoqué pendant le film) réduit à un trauma familial réglé en à peine cinq minutes, comme si sa résolution, lapidaire, suggérait finalement son peu d’importance (et d’incidence) sur la soudaine déviance d’Hunter. Mirabella-Davis disposait pourtant d’une conclusion idéale, et terrible, avec cette scène dans la chambre d’hôtel qui nous aurait laissé là, au pied d’un lit, avec Hunter «savourant» le terreau d’une vie apparemment plus libre.
Créée
le 17 janv. 2020
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