Fernando passe des vacances de rêve à la campagne avec ses amis. Sans la présence de leurs copines, les garçons se sentent libres de se promener nus, dans une proximité intime les uns avec les autres. Fernando invite alors German, un ami proche de son cours de Taekwondo, dont il ignore l’homosexualité. Petit à petit, les deux amis se rapprochent.


EN CHAIR ET EN OS (critique prise suer le site du Marais film festival.)


Il y a plus d'un paradoxe à l’œuvre dans le nouveau film de l'Argentin Marco Berger (Absent). Le principal est sans doute qu'il s'en dégage une tension sexuelle incroyable, rarement ressentie ailleurs, alors même qu'il n'y a aucun acte sexuel à l'écran. Une bande de potes, sportifs mais glandeurs, partagent une maison de vacances. Ils traînent en caleçon pour supporter la chaleur, tirent à la courte paille pour savoir qui ira acheter du Nesquik, ils s'imaginent aller draguer les voisines sans jamais trop passer à l'action... et c'est tout. Et pourtant le résultat est chaud, chaud, chaud. Un temps, la (fausse) absence d'enjeux apparents menace de faire ressembler Taekwondo à une très longue pub pour sous-vêtements, faite uniquement pour passer dans des bars gays, et dans laquelle des beaux gosses s'ennuieraient nonchalamment devant la caméra. C'est évidement faux. Il n'est pas interdit d'apprécier le film pour des raisons superficielles et esthétiques (et en effet, la grosse partie du casting est scandaleusement canon), mais ce serait s'arrêter en court de route. Il y a là des idées, un point de vue, du trompe l’œil, bref: du cinéma.


Le film débute alors que débarque un petit nouveau dans la maison de vacances. Plus jeune et fluet que les autres, German est plutôt du genre à lire Salinger en cachette qu'à essayer de choper la femme de ménage. Cela suffit-il à déduire qu'il est homosexuel? Est-ce ce que pense Fernando, qui l'a invité à passer quelques jours avec eux ? Qui imagine quoi ? Le film slalome autour de cette questions de façon plutôt maline. En lançant plusieurs pistes sans jamais donner de réponses trop fermées, Marco Berger crée un suspens érotique très fort, et d'autant plus étonnant qu'on ne sait jamais de quelle manière la pression va sortir. Mine de rien, il se crée alors quelque chose de presque radical dans le film: alors qu'on pourrait presque dire qu'il ne s'y passe rien, le récit se dévoile à coup de micro-événements. De la même manière que dans sa mise en scène, Berger fait un usage répété et surprenant des gros et très gros plans, ce sont les plus petits détails qui créent le récit, car ils font naître le fantasme.


Il y a en effet quelque chose du fantasme dans ce film à la fois sexy et solaire, dans ce décor de rêve de piscine peuplée de beaux mecs bronzés. Quelque chose de presque irréel, alors que le film n'est jamais autre chose qu'ultra réaliste. Berger parvient à cet équilibre en évitant toutes les scènes attendues ou redoutées. Les mecs en question ont beau être des gaillards, ils ne sont ni beaufs ni violents. A l'inverse, ils ne se transforment pas non plus en parfaits gentlemen trop beaux pour être vrais. L'érotisme autour de ces personnages ne naît pas d'une sur-virilisation trop facile des corps masculins, mais au contraire de la mise en avant d'une nudité banale, non-sexuelle. Ces gars-là sont tellement à l'aise entre eux qu'ils se trimballent à moitié à poil, et c'est moins leurs muscles que leur nonchalance inconsciente qui les rend sexy. C'est un contre-pied encore rare dans le cinéma (gay ou non). En basant son film dessus, Taekwondo ne fait pas que nous rincer l’œil, le film parvient à montrer quelque chose d'encore plus rare, et trop rarement pris au sérieux au cinéma: une intimité masculine qui n'est pas gênée par la nudité. Les poster-boys deviennent de vrais personnages humains, touchants, en chair et en os.

HenriMesquidaJr
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le 26 janv. 2017

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HENRI MESQUIDA

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