Sur la route !!!
Jean Rochefort était un géant. Le verbe de Molière avec l'élégance du gentleman farmer, un humour pince-sans-rire qui m'aura souvent fait écrouler de rire, mais qui aussi dans le registre dramatique...
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le 16 oct. 2017
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Cherche chien rouge vermillon perdu sans collier, sur l'autoroute...
Ca faisait longtemps que je n'avais pas revu ce "tandem" dont assez curieusement, j'étais convaincu que le second rôle fut tenu par Marielle.
(Ne pas confondre au titre éponyme plagié en 2023 par un épouvantable navet, colporté par France 3, de et avec l'infâme Astrid Veillon qui me rappelle cet apophtegme "Toutes les femmes sont d'excellentes comédiennes... Toutes sauf certaines actrices !")
Ma surprise fut donc grande de découvrir en lieu et place un "faire-valoir" de Jugnot, non moustachu certes, mais ô combien sympathique, jouant l'homme à "toutes mains" d'un présentateur vedette de radio : Michel Mortez. (Rochefort) Le tandem va sillonner la France avec son jeu "La langue au chat".
Un pastiche des jeux radiophoniques qui faisaient fureur après guerre dont Radio-Luxembourg fut un précurseur, rendant leurs animateurs célèbres. De cette époque je me souviens des Guy Lux (eh oui déjà, tout jeune et débutant !) Roger Lanzac, Zappy Max, Marcel Fort (salut Marcel !), Lucien Jeunesse (avec son jeu des mille francs dont vraisemblablement les scénaristes se sont inspirés...) mais il y eut aussi le célèbre "Quitte ou Double" et "La Chose" qui donna naissance au Schmilblic de Coluche....
Tout jeune, j'enviais secrètement ces stars du micro si sympathiques : en apparence du moins, car la réalité était toute autre. Ayant participé comme candidat à deux de ces jeux dans l'un l' animateur que j'imaginais sympa a commencé par eng...tout le monde de ne pas être prêts. Alors que lui, invité à un gueuleton du maire, avait une bonne heure de retard et tout le monde l'attendait en s'inquiétant puisque l'heure de retransmission approchait . L'autre était symptomatique de la mauvaise humeur : l'inverse sa" jovialité souriante de Monoprix" Chacun de ses co-équipiers s'attendait à ce qu'il hurle en arrivant. Pour éliminer son stress, ou parce qu'il était perfectionniste maladif ?...
J'ai entendu plusieurs témoignages d'artistes itinérants qui montraient que la face du décor qu'on découvre : réceptions, autographes, fanatisation des foules, cachait une réalité souvent moins reluisante, enviable.
Je me souviens de cet animateur de France 3 complètement déprimé d'être sur les routes à longueur de temps, et ne sachant plus chez lui voir l'ombre d'une valise au point de renoncer à partir en vacances !
Et de Gainsbourg qui comme à son habitude, complètement "imprégné" , dans une émission de télé, à laquelle était aussi convié Eddy Mitchell et qui l'interrogeait : "En étant connus, on s'en est tapé des belles gonzesses, hein ?" Et comme Eddy esquissait un sourire dubitatif, Serge persistait : "Mais qu'est-ce qu'on a dû aussi se farcir comme boudins pour ne pas rentrer et dormir tout seul, le soir à l'hôtel ! Pas vrai ?" Et Eddy de botter en touche en disant que sa femme regardait peut-être l'émission...
Voici donc l'ambiance de cette aventure où l'équipe radio se limite à son présentateur, et à son chauffeur-porte-valises-ingénieur du son, comptable, chauffeur de salles (...) et j'en passe !
Tandis que dans la réalité, un autre tandem lui, pédalait dans un autre genre de virage :
Patrice Leconte est un de mes réalisateurs préféré : j'aime les gens modestes comme lui, et être surpris. Lui cite volontiers sa ligne de conduite : "j'aime être là où on ne m'attend pas". Ici, le scénariste-réalisateur prenait de gros risques : il abandonne en effet le style habituel plutôt marrant des oeuvres précédentes, pour nous plonger dans la sombre réalité de la vie, parfois amusante mais souvent maussade, froide voire glaciale, dramatique, angoissante... Nombre d'animateurs, leur succès passé, furent dégradés à la promotion de produits dans les hypermarchés. Le réalisateur ne pourra néanmoins pas s'empêcher de se laisser aller à certains gags : comme celui du chien rouge vermillon de l'autoroute où on le voit en caméra "off" se tordre de rire sur le travelling aux dialogues de Rochefort et Jouniau l Pari risqué car cette année-là, le cinéma, naufragé par la télévision, est au plus bas de sa fréquentation, malgré 368 films produits.
1987 : cette année-là c'est Crocodile Dundee qui culminera en tête du box-office avec 6 millions d'entrées en salles. Tandem ne fera "que" le dixième de ce score malgré des critiques plutôt encourageantes.
Autre virage aussi pour Jean Rochefort qui endurait une traversée du désert de sa popularité : le clown était souvent triste, dépressif... Ce film allait le remettre en selle.
Voici pour ce scénario, d'une grande sensibilité co-écrit avec Patrick Dewol, mais qui eut mérité d'être plus étoffé... Par contre, les cinq minutes de prises de vues de la circulation sur une autoroute qu'on nous inflige au début, et qui eut pu servir à la surexposition du générique, n'étaient pas d'une nécessité absolue...
Le casting est une petite merveille et je n'en ai pas été surpris, s'agissant des oeuvres de Gérard Moulévrier que j'ai toujours admiré pour ses choix. On notera ici la présence de Julie Jézékel dont la carrière s'annonçait prometteuse, mais aussi une "gueule de cinéma" aguerrie comme Jean-Claude Dreyfus. Il soumettra Mortez à son propre jeu... Aucun couac dans les choix et celui en faveur de Jugnot aura probablement d'un Leconte qui le connaît bien : ils auront travaillé ensemble sur 8 films...
Enfin, la musique repose sur le tube de l'époque de Richard Cocciante dont la ritournelle sera présente dans tout le film mais revisitée sans qu'on se lasse et habilement par Claude Bernheim.
J'aime bien aussi le jingle musical qui annonce les films Pathé, allez savoir pourquoi... Ici la société nous avait offert une version restaurée en 2020. Un film dédié à "Taviani" lesquels étaient des réalisateurs-scénaristes italiens. Mais aussi à Taviano, et là, je n'ai pas trouvé...
De nos jours, les tandems sont heureusement mieux motorisés qu'au temps de cette vieille Ford du film...
Arte le 04.12.2020-
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Créée
le 8 janv. 2024
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