Du point de vue cinématographique, Taxi Driver est digne d’un Scorcese. L’atmosphère des bas-fonds de New-York, son ambiance, sa population, ses éclairages, ses rues : tout est superbement rendu.
La prestation de Robert de Niro est impeccable, sa scène devant le miroir, totalement improvisée, est bluffante !
Taxi Driver s’ouvre sur un regard las et vide. Celui d’un jeune fatigué de ne pouvoir dormir, désabusé, portant un regard sombre et pessimiste sur le monde qui lui vient de l’expérience qu’il en a. De sa vie on ne saura rien, sinon qu’il a été marine et qu’il a fait la guerre du Vietnam ce qui en dit suffisamment… C’est donc avec un homme fragilisé, anxieux que nous faisons connaissance. Nous découvrons vite qu’il a du mal à entrer en relation, il ne sait pas comment s’y prendre, il est, comme on dit, « inadapté ». Il n’a pas de culture : pas d’idées politiques, il ne connaît pas la musique et sa seule cinématographie réside dans les films porno.
La rencontre de Betsy illumine son existence l’espace d’un bref moment. Avec elle, il est entier, direct, volubile. Le courant passe, bien qu’ils n’appartiennent clairement pas au même milieu. Mais il ne trouve rien de mieux que de l’emmener voir un film porno… Après le refus de Betsy de le revoir, il sombre peu à peu dans la folie. Il est incapable de comprendre pourquoi elle le fuit et il réagit en disant : « I realize now how much she’s just like the others, cold and distant », incapable d’interroger son propre comportements. Sa vision pessimiste du monde se renforce. Sa conduite devient celle d’un psychopathe.
Le drame de cet homme c’est la solitude : « Loneliness has followed me my whole life, everywhere ». Solitude renforcée par son incapacité à formuler et verbaliser sa pensée. Quand il tente de parler à un collègue : « I got some bad ideas in my head », il n’arrive pas à formuler davantage et son collège lui sert des généralités qui peuvent difficilement l’aider. Il reste seul avec ses pensées qui tourbillonnent dans sa tête et qui le minent.
Comme tout être humain il a besoin de donner un sens à sa vie. Et pour cela il va se donner une mission à lui-même : débarrasser cette société de la « racaille ». Cela prendra concrètement forme dans la libération d’une jeune prostituée de 12 ans. Libération accomplie au prix d’un massacre sanglant.
La finale est déroutante. Quelle que soit la justesse de sa cause, il a assassiné. Mais loin d’être mis en prison, il est encensé par la presse et considéré comme un héros.
Nous le retrouvons à la fin dans son taxi, apparemment apaisé jusqu’au dernier plan sur son visage où nous voyons son regard de nouveau inquiet balayer les rues avec anxiété.
Il n’y a aucun doute, c’est très bien filmé, très bien joué, c’est un portrait pathologique finement dressé. Mais je n’arrive pas à accrocher autant que la réputation de ce film le demanderait. J’ai du mal avec les films qui traitent des psychismes torturés, avec ces ambiances lourdes et glauques et surtout je suis gênée par cette finale qui fait de Travis un héros.