Taxi Driver, un monument de l'Histoire du cinéma.


Taxi Driver, je sais que je l'ai déjà vu.
Quand? M'en souviens pas! Ça parle de quoi? Je sais plus! Des bribes de souvenirs? Robert De Niro, un taxi, des rues sombres, un crâne rasé, "You're talking to me?"...Oui... vraiment des bribes... Je suis visiblement passée au pied de ce monument sans le voir!


Et ce lundi soir d'octobre, vautrée dans le canapé après une bonne journée éreintante de ménage de printemps, voilà que je pianotais sur ma télécommande, désinvolte, sans espoir particulier de tomber sur quelque programme intéressant. Au quotidien, je regarde très peu la télé et il est extrêmement rare que je tombe sur un film qui ne soit pas déjà commencé, et le cas échéant, que j'aie envie de voir ! Je deviens de plus en plus difficile avec l'âge et j'ai perdu la fougue cinéphilique de mon adolescence! Mais ce lundi soir, je tombai par hasard sur les premières images, volutes dans la force de puissantes percussions, soutenues par des cordes cinglantes et des vents vrombissants laissant place aux premières notes lascives d'un saxophone... La partition inoubliable de Bernard Hermann comme œuvre posthume. Des yeux, un taxi, des rues sombres... Resurgirent alors des sensations de déjà-vu, déjà-entendu. Des bribes... Quoi ? Quand ? Je sais plus... 

Le film commençait tout juste...


Une heure et cinquante-trois minutes après, je me demandai comment j'avais pu ne passer qu'à côté de cette œuvre sans y plonger et n'en garder que des brides. *"Taxi Driver... Mouais..."* j'avais dit un jour...Parce qu 'à la fin de mon second visionnage, je n'ai pas eu la sensation d'avoir plus que ces vagues jaillissements du passé. Aucun souvenir ni d'Harvey Keitel, ni de Jodie Foster. J'avais peut-être trop forcé sur le cannabis ce jour-là, si bien que le film était allé se ranger dans le tiroir de ma mémoire étiqueté « aussitôt vu, aussitôt oublié ». Peut-être oui ...
Roberto avait tout de même un sacré charme à l'époque ! Charme qui ne m'avait sûrement pas plus atteinte que ça, ce fameux jour oublié. Un acteur plaisant, voire beau-gosse, ça aide forcément à tenir la spectatrice en haleine. En tout cas, avec moi ça marche, si le film n'est pas un gros navet insoutenable de deux heures ou plus! Non, je ne citerai pas de nom. En revanche, comme celui-ci ne m'a pas plus marquée que ça à l'époque, je ne peux que constater que mes critères de beau-gossitude ont évolué avec le temps. M'enfin c'est pas étonnant ; si je m'en souviens si peu, c'est que ça doit faire un bail que je l'ai vu ce putain de film immémoré! Après, ce qui me laisse dubitative, c'est qu'en ce bail-là, j'étais une sacrée cinéphile et que je m'astreignais à voir les films dits « cultes », en entier, qu'ils me plaisent ou non. Et j'avais la capacité d'en garder une mémoire assez vive ! Mais *Taxi Driver*, est lui, passé, au travers des voiles des limbes de mon esprit. Soit. Étrange , mais soit ! Mais voilà dorénavant que je m'égare... et t'égare sûrement aussi, cher lecteur, si tu existes, puisqu'à la fin du quatrième paragraphe de ma critique, tu n'es pas beaucoup plus avancé dans ton choix de voir ce film ou pas. Hormis peut-être, si tu aimes les hommes et que tes critères actuels de beau-gossitude s'approchent des miens. A croire que je tourne autour du pot afin de ne pas m'attaquer pour de bon à la critique de ce film. Revenons-en à nos moutons donc !
Robert tient le rôle principal du film. Travis, le Taxi Driver, THE Taxi Driver himself (with the accent, please!) auquel il attribue un charme désuet. Désuet. Voilà un adjectif qui procure à charme une nuance certaine à mon goût. Il est possible alors qu'à l'époque, j'ai été plus touchée par la désuétude du personnage qu'atteinte par son charme. Malgré mon amnésie inexpliquée, Travis est un personnage bien ancrée dans la réalité de son pays en tant que vétéran de retour du Vietnam, reconverti en chauffeur de taxi dans les bas-fonds new-yorkais. Toi, spectateur, comme moi, en ce lundi soir d'octobre, tu suivras ensuite la descente aux enfers de ce héros de guerre, de retour dans son pays, pour lequel il s'est battu, et qui lui dégueule au visage, toute son atrocité lors de ses tournées nocturnes. Ses tentatives de raccrocher à « une vie normale » se soldent par des échecs et gravent sa solitude dans la pierre. Au niveau de la réalisation, cet isolement est mis en relief par la lecture en off d'extraits de son journal intime, une plaque d'égout qui fume dans une ruelle sordide, image mythique de New-York, la pénombre d'un cinéma porno, des images de Travis seul au volant, seul chez lui, seul face aux personnes qu'il côtoie, sans répondant face à ses maladroites tentatives de communication envers elles. Travis essaye en vain de frôler l'amour et la politique, mais ça tu le découvriras de tes propres yeux et tu verras alors que Travis échoue, se résigne, puis se forge un personnage de justicier moderne et violent, afin de régler à sa manière les maux de la société qui l'entoure. Et Travis, sa manière, c'est les armes ! Une lueur de rédemption m'a semblé possible lors de sa rencontre avec Iris (Jodie Foster), une jeune fille, prostituée qu'il tente de sortir du joug de Sport, son mac (Harvey Keitel) pour qu'elle retrouve la vie d'une fillette de son âge. Mais face à la résignation d'Iris à rester telle qu'elle est, Travis est rattrapé par ses démons, et finit par les régler ses comptes. A sa manière donc !
Je n'ose en raconter plus, car même si je me suis éparpillée dans des divagations personnelles, j'en ai peut-être déjà trop dit dans le paragraphe précédent. Mais comme c'est pas mon genre de spoiler la fin des films, parce que j'aime pas qu'on me le fasse non plus, tu la verras par toi-même et j'espère que tu seras aussi surpris que j'ai pu l'être.
Comment ne me souvenais-je pas de la violence et l'absurde ironie de la scène dans la chambre d'Iris ?
Comment avais-je pu oublier cette fin qui ébranle, parce que peu conventionnelle et pourtant si proche du rêve américain et des héros qu'il s'est construit ?
Comment n'ai-je pu être marquée au fer par cette chute impromptue qui m'a, cette fois, laissée hébétée, tant Scorcese l'a maîtrisée ?
Non, vraiment je ne comprends pas comment j'ai pu laisser cette œuvre aussi longtemps de côté et la dénigrer, pensant l'avoir vue alors que j'aurais été incapable de raconter le pitch. C'est pourquoi j'espère que toi, lecteur, quand tu verras ce film, tu seras touché par sa grâce et que tu ne mettras pas comme moi x années à accepter le rendez-vous. J'espère que tu sauras voir au premier coup d’œil, pourquoi ce film a ébranlé le cinéma à son époque et s'attache à toujours rester d'actualité voguant sur une mélodie intemporelle.
LorakEnanak
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le 28 oct. 2015

Critique lue 410 fois

Lorak Enanak

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