Laborieux et faux...
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Un homme et une femme sont dans un taxi dont nous ne voyons pas le conducteur. Mais ce chauffeur est étrange, il refuse le paiement de son client et ne connaît pas les trajets à suivre. D’ailleurs l’homme s’en étonne :
T’as eu ta licence dans une pochette surprise ? T’es taxi ou quoi ? Comment tu fais pour ne pas savoir où est l’hôpital Parsian ? (…) c’est quoi ce binz ? (…) Décidément t’es taxi comme je suis cosmonaute !
Après que l’homme soit descendu puis la femme, nous voyons le visage du chauffeur et découvrons son identité : il s’agit du réalisateur Jafar Panahi.
Taxi Téhéran est un film clandestin. Le réalisateur a été condamné en 2010 par la justice iranienne à 6 ans de prison ferme pour propagande contre le régime. Il a ensuite été placé en liberté conditionnelle avec interdiction de tourner des films et de quitter le territoire. Taxi Téhéran est le troisième film clandestin qu’il réalise depuis cette interdiction… Jafar Panahi signe donc ici une œuvre politique et courageuse.
Taxi Téhéran est un docu fiction dans lequel Jafar Panahi se filme lui-même tandis qu’il est en train de réaliser son film. En le regardant, impossible de ne pas penser à ce film d’Abbas Kiaorostami, autre réalisateur iranien et ami de Jafar : Et la vie continue, dans lequel le cinéaste se met en scène et traverse le pays en voiture suite au tremblement de terre de 1990. Même démarche : montrer la réalité tout en la mettant en scène.
Taxi Téhéran est un huis-clos, durant 1h30 nous ne quittons pas le taxi tandis que les passagers vont et viennent. Certains s’amusent de reconnaître Jafar Panahi dans ce chauffeur de taxi peu compétent. Mais surtout divers sujets sont abordés et lèvent un voile sur la société iranienne, tels : la peine de mort pour des délits aussi mineurs que le racket ; la censure exercée par le gouvernement sur la réalisation cinématographique ; les films américains qui sont vendus sous le manteau ; les croyances superstitieuses locales ; des filles arrêtées et emprisonnées pour avoir participé à un match de volleyball.
Les personnes qui se succèdent sont pour la plupart des personnalités hautes en couleur. Pour tourner ce film interdit, Jafar a fait appel à des non professionnels qui sont restés ainsi anonymes. Leur nom n’apparaît pas au générique pour les protéger. Ce sont des personnes de la famille de Jafar ou des amis, des connaissances ou des connaissances de connaissances. Tous ont pris un risque en acceptant d’apparaître dans ce film. Il y a tout de même au milieu de ces anonymes une personnalité : Nasrin Sotoudeh, une avocate iranienne, spécialisée dans les droits de l’homme qui a été arrêtée une première fois en 2010 puis de nouveau en 2018 et 2021.
Durant ce voyage en taxi, le chauffeur nous offre un doux sourire qui ne le quitte pas jusqu’à la fin. Magnifique quand on sait ce qu’il a souffert et ce que souffre son pays ! Ce film est un beau pied de nez au régime, mais un pied de nez qui peut coûter cher à son auteur. Il a reçu l'Ours d'or au Festival de Berlin 2015. N'étant pas autorisé à aller chercher la récompense, c'est la jeune nièce de Jafar qui est allée la chercher pour son oncle. Ce succès n'a pu que mettre en rogne le régime… Jafar Panahi a de nouveau été arrêté en juillet 2022…
Disponible sur Arte : https://www.arte.tv/fr/videos/071355-000-A/taxi-teheran/
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Créée
le 10 sept. 2022
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