De nos points de vue auto-centrés d'européen, les pays soumis à la loi islamique ou du moins, s'en inspirant fortement, nous sont toujours apparus comme moralement irréprochables, à la limite d'une certaine forme de fanatisme visant l'assainissement le plus total du corps et de l'esprit. Eh bah non, loin s'en faut même. "Téhéran Tabou" est un film d'animation s'intéressant à plusieurs destins d'habitants de Téhéran faisant face à leurs contradictions liées aux pulsions humaines qui les animent. L'intérêt principal de ce film est sans doute de casser le principe selon lequel ce que nous voyons sur nos écrans retranscrit la réalité des choses. Comme tout un chacun, les habitants de la capitale iranienne s'adonnent aux plaisirs de la chair, se droguent et écoutent de la musique transgressive (et oui, Motörhead est présent dans le film). Pourtant, pour réaliser un tel film, inutile de souligner que le projet n'aurait pu se faire sur place. D'où l'idée d'utiliser la rotoscopie (tournage sur fond vert) qui permet d'animer de vrais acteurs. Le souci, c'est que ce procédé, bien qu'agréable pour les yeux, a le démérite de rendre impersonnel les personnages présentés qui se diluent dans une animation parfois trop sombre. Côté narration, on s'étonne devant le décalage provoqué par le concept de l'oeuvre qui rend, tantôt comique, tantôt tragique, les situations vécues par les personnages qui relèvent la plupart du temps de l'absurde le plus total. On regrette tout de même que le cinéaste, Ali Soozandeh, ait forcé un peu trop le trait à certains moments du film (le médecin pratiquant dans la clandestinité et son cabinet tout droit sorti de "Saw" avec raclements de gorges et crachats à répétition). "Téhéran Tabou", bien que maladroit dans le traitement de son sujet, reste une oeuvre très intéressante dans sa déconstruction des stéréotypes occidentaux. Pour le côté engagé de l'oeuvre cependant, le cinéaste ne se mouille à aucun moment et fait l'erreur de traiter tout ses protagonistes sur un pied d'égalité.