Depuis son premier long-métrage Maborosi en 1995 jusqu’à son avant-dernier film Les bonnes Étoiles sorti en 2022, Hirokazu Kore-Eda explore en profondeur la thématique familiale. Avec Tel Père tel Fils, il propose un point de vue particulier sur les notions de paternité et de maternité, en racontant l’histoire de deux couples dont les vies se retrouvent bouleversées lorsqu’ils découvrent que leurs fils respectifs ont été échangés à la naissance, et qu’ils ont sans le savoir élevé un enfant qui n’était pas le leur. Ce qui aurait pu aboutir à un drame compte tenu du propos est finalement une œuvre dont le sujet et les relations filiales sont traités avec une tendresse infinie et offre un moment de douceur parfait. Les personnages des enfants sont en réalité un prétexte pour se poser la question de ce qu’est au fond que d’être père et mère, et permettent de rappeler que les adultes ne sont rien d’autre que des enfants qui ont grandit, et que l’amour est un besoin universel, intemporel, bien plus nécessaire que les liens du sang. Les mères culpabilisent, ne se sentent plus à la hauteur du rapport maternel qui existe bel et bien entre elles et l’enfant qu’elles ont élevé. L’un des pères quant à lui s’inquiète de ne pas ressentir cet amour normalement naturel avec son fils, tait ses traumatismes intimes et indicibles pour en protéger ceux qu’il aime. Sa fuite illusoire pour échapper à ce qu’il ne veut pas être est heureusement ralentie par l’évidence de ce qui est vraiment important : l’amour. Le film développe ainsi une réflexion sur la définition du lien filial, et finit par démontrer l’évidence qu’il repose uniquement sur l’amour pur, simple et inconditionnel. Le cinéaste multiplie dans sa mise en scène les détails innocents, les cerfs-volants et les regards complices, dans un langage universel qui ne veut laisser ni les enfants ni les adultes indifférents. Cette poésie visuelle est rythmée par des dialogues profonds mais qui ne se veulent jamais complexes, reposant sur la quête d’un équilibre grâce auquel le bonheur peut prendre toute sa place. Le film n’est cependant pas naïf et trouve le juste équilibre envers toutes les missions qu’il se donne : être tendre, être un peu douloureux, donner à réfléchir, et amener le spectateur vers l’idée que ce qui est beau, simple et doux suffit. Kore-Eda est contre l’excès, et reste dans l’interstice parfait où tout spectateur peut se retrouver et apprécier la beauté de la simplicité. Il assume pleinement sa sensibilité et la partage volontiers, dans l’idée qu’elle est nécessaire à tout enfant, petit ou grand.