Poulpe Fiction

Au registre des grandes menaces sous marines véhiculées par le cinéma la pieuvre se classe peut être troisième après les requins et les piranhas mais bien avant les gambas et les poissons clowns. Dans le sillon du film Les Dents de la Mer de Steven Spielberg vont naître toute une vague de pâles copies opportunistes dont Tentacules du réalisateur et producteur italien Ovidio G Ossonitis est un magnifique exemple. Cette production italienne tournée en Californie embarque quelques grandes gloires hollywoodiennes comme John Huston, Shelley Winters ou Henry Fonda dans un film qui à défaut de leur promettre un Oscar leur offrait une palme et des tubas.

Tentacules raconte donc l'histoire d'une pieuvre géante qui sème la panique dans un petit village côtier de Californie alors que se dernier s'apprête à célébrer une course de frégates. Un journaliste, le shérif et un spécialiste de la mer vont tenter de mettre fin au cau-au-chemar.

Si on parle bien d'un octopus géant il est inutile d'espérer de Tentacules des sommets dans le spectaculaire et pour cause la pieuvre géante et mécanique commandée pour le film pour près d'un million de dollars sombrera comme une grosse merde dans l'océan à peine posée sur l'eau. Du coup Ovidio G Ossonitis devra se contenter d'une petite pieuvre et de maquette de bateau miniatures ou de plongeurs en plastique d'aquarium. On aura tout de même droit au crâne et aux yeux globuleux du mollusque fendant l'océan comme un aileron de requin en rugissant et au mépris de toute logique biologique et une tonne de très gros plans histoire que les tentacules envahissent l'écran. Au niveau de son histoire Tentacules ne fera pas de vague et restera aussi plat qu'un lac un soir d'été avec tout de même un vague fond d'écologie puisque ce sont de vilains industrielles qui réveille la pieuvre. Les trois personnages principaux sont un journaliste courageux qui dénonce, un shérif un peu à côté de ses pompes (il ne pense même pas à interdire la régate alors que les morts s'accumulent) et un grand spécialiste de la mer puisqu'il est dresseur d'orques dans une sorte de Marinland et qu'il porte un cirée jaune. D'ailleurs c'est après avoir longuement discuter philosophie existentielle avec ses deux orques comme si ils étaient deux vieux potes que notre sauveur les enverra se battre contre la pieuvre donnant naissance à une poignante séquence avec un vieux mollusque déjà mort déchiqueté par deux gants de toilette en forme de tête d'orque. La mise en scène de Ovidio G Ossonitis est d'ailleurs assez amusante puisque le réalisateur semble parfois péter un câble truffant sa réalisation d'images fixes en plein cœur d'un montage foutraque et ultra-cut. La "grande" scène de la course de la frégate est à ce titre un joyeux moment de n'importe quoi puisque pendant que des gamins courent à la mort Ovidio G Ossonitis alterne avec des séquences montrant un type racontant des blagues rejetés par Carambar à un public hilare et inconscient du danger. A ce propos vous saviez que le comble d'un arbre est être dur de la feuille ?? Mais revenons en au film car les plus perspicaces pourront même s'amuser de quelques erreurs assez jubilatoire comme lorsque dans une scène on voit des gardes côtes qui débarquent les enfants qu'ils viennent de récupérer en mer et qui si on observe bien la séquence on pourras voir un type débarquer au moins trois fois de suite du bateau.

Alors bien sûr Tentacules reste un sous Jaws fauché, opportuniste et ultra maladroit mais le film de Ovidio G Ossonitis possède aussi quelques scènes plutôt réussi comme le suspens orchestré autour de la toute première victime (un bébé laissé sans surveillance) ou l'exploration d'un étrange cimetière marin de poissons têtes en bas à la verticale. Même si personne ne pourras croire qu'ils sont venus pour la fulgurance du script ou la renommée du réalisateur John Huston qui fait le boulot et Shelley Winters qui est assez drôles sont plutôt convaincants, quant à Henry Fonda tout juste remis d'une opération cardiaque au moment du tournage il n'apparaît que quelques minutes sur un registre minimum. Il faut aussi saluer la bonne musique de Stelvio Cipriani même si ce dernier semble avoir passablement recyclé des thèmes déjà existants comme celui du film La Polizia Sta a guarde , en tout le final un peu ridicule est servi par une musique complétement épique et emphatique ce qui va créer un décalage assez savoureux.

Tentacules est finalement bien plus un film de producteur malin que de réalisateur talentueux; il faut toujours se méfier des contrefaçons sinon on finit par confondre Tantacules et Enc... ta tante. Sur cette dernière lamentable saillie fraîche comme une brise marine et pieuvre de ma grande fatigue je m'en vais voguer vers d'autres bisseries.