Terre et Cendres
6.4
Terre et Cendres

Film de Atiq Rahimi (2005)

Premier film de Atiq Rahimi, un afghan possédant également la nationalité française, connu pour avoir écrit plusieurs romans et réalisé quelques documentaires, ce métrage suit un patriarche d'une famille des région reculées d’Afghanistan, sur le chemin d'un voyage ardu, déchiré par la guerre de 1979, accompagné de son jeune petit-fils, pour porter de mauvaises nouvelles au père de l'enfant travaillant dans une mine éloignée. Un film grandement influencé par le cinéma iranien avec des touches d'art et essai et quelques inflexions occidentales.


Production franco-afghane, ce film marie avec justesse la retenue émotionnelle et le rythme contemplatif du cinéma local avec un style de réalisation plus proche du cinéma européen, notamment des flashbacks et des séquences de rêve. Symbolisant le renouveau du cinéma afghan d'après-guerre.


Pour parler un peu du synopsis:
Dans un paysage de couleur kaki vallonné, si stérile que les arbres étranges apparaissent comme irréels, le patriarche Dastaguir (Abdul Ghani) et son petit-fils de 5 ans, Yassin (Jawan Mard Homayoun) tentent de voyager jusqu'à une mine en auto-stop, mais ils le font la plupart du temps à pied. La raison de ce voyage est l'annonce d'une nouvelle terrible à son fils travaillant dans la mine, une nouvelle symbolisant les souffrances d'un peuple et d'un pays, entre présent, passé et avenir...


L'essentiel du film va se dérouler autour d'un poste-frontière, composé d'une maison sentinelle tenue par Fateh (Kader Arefi), une cabane vendant de la nourriture et des cigarettes gérée par le bon commerçant Mirza Qadir (Walli Tallosh), un pont sur une rivière à sec reliant les deux bâtiments, et un char abandonné où une femme voilée et sa fille viennent chaque jour attendre, sans qu'on sache pourquoi.


Ici, le paysage avec ses vastes horizons inhospitaliers est autant un caractère filmique que les gens qui le peuplent, Rahimi utilise d'ailleurs un dialogue plus visuel pour faire avancer l'intrigue. Il affiche également un penchant pour les touches vaguement surréalistes, y compris le fait d'avoir des personnages hors caméra parlant à Dastaguir, qui pourraient être soit des fantômes, soit des créations de son imagination en détresse. L'approche légèrement non-linéaire de la structure de narration suggère aussi que le film est tiré d'un livre, écrit par le cinéaste lui-même.


L'utilisation d'acteurs non-professionnels est typique dans ce genre de production. La réalisation les cajole cependant un peu trop, leur prestation est sincère mais très académique, avec notamment Ghani qui est très flegmatique pour un homme ayant encouru tant de souffrances, le personnage de Tallosh, le commerçant généreux, est assez appréciable, ce rôle lui permet de briller grâce à quelques monologues très bien sentis.


En dehors de cela, le film est très plaisant, malgré son rythme lent, on ne s'ennuie pas, on peut cependant avoir un peu de mal à comprendre où le film veut nous emmener, comme si les touches de surréalisme avaient été placées un peu sans raison, pour casser l'aspect premier degré du récit, reste tout de même un discours très intéressant sur un pan de l'histoire méconnu, la petite histoire cachée derrière la grande comme on dit, ou comment se passe la vie de ces gens vivant dans les coins reculés de ces pays du tiers monde ravagés par la guerre, et c'est plutôt touchant, la simplicité de leur existence, la façon dont ils endurent des souffrances qu'ils n'ont pas choisi, qui leur sont simplement tombées dessus.


En somme, un très beau film, que tous ceux qui s'intéressent au moyen-orient devraient voir!

Schwitz
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le 23 oct. 2016

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Schwitz

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