Ah Argento, on ne peut pas dire que le point fort du bonhomme soit ses scripts, et Opera en est une énième confirmation tant il est l’exemple criant d’une mise en scène récréative qui ne prend même plus la peine de tenter la cohérence pour passer d’un moment de bravoure à un autre. Conséquence, ceux pour qui l’écriture est un élément primordial, pire ceux qui ne connaissent pas vraiment le maestro, ne pourront que pester devant l’attitude complètement aux fraises de Christina Marsillach, la gazelle pris au piège, au charme certain mais aux neurones complètement éteints. La voir reprendre ses esprits alors qu’elle est le témoin des morts successives de toutes les personnes qui lui sont chères, en s’allongeant sur un lit et en se concentrant uniquement sur la musique, est assez autre.
Mais voilà, pour quiconque saura passer outre l’absence d’un souffle narratif même minime, le divertissement peut commencer. Et de ce côté-là, la tête plein d’idées farfelues, les mains folles d’une ambition certaine, Dario assure. Chaque mise à mort présente son quota de gore rafraîchissant assorti d’un challenge visuel la plupart du temps relevé. Jamais plus vous ne vous risquerez à vous rassurer sur la potentielle présence d’un voyou sur le pas de votre porte, en contemplant la pénombre par le traître que vous avez installé sur cette dernière. Quant à ces petits animaux à plumes qui s’amusent à rivaliser dans les basses avec les cordes vocales d’une diva peu rassurée, faites comme moi, passez commande. Amazon les livre dressés, prêts à dégommer les enfoirés de salopards qui s’amuraient à rentrer chez vous armés de mauvaises intentions.
Blagounette à part, parlons mise en scène pure, car il y a tout de même dans Opéra quelques mouvements de caméra bien sentis, à l’image de cette adaptation de la guéguerre Ripley/Alien dans des conduits d’extraction : ici, mise en situation semblable, la femme commando troque bras de fer contre poussage de chansonnettes mais rampe avec la même trouille dans des conduits squattés par un organisme indésirable. L’effet est malin et très réussi. Dans chaque plan d'Opera se sent l’intention d’Argento de livrer une plastique inspirée et inspirante.
Pour faire court, Opéra est une belle démonstration de savoir-faire de la part d’un artisan de l’horreur qui n’a pas volé sa réputation, bonne ou mauvaise. L’homme prouve une nouvelle dois que le qu’en dira-t-on l’importe nullement, du moment qu’il se marre en malmenant chair et sang de ses jouets, tout va bien. A ce niveau là, le contrat est rempli.
Mais forcément, à juger le film dans sa globalité par contre, même en tant que fan, il est difficile de passer complètement outre l'imbécillité qui occasionne cette débauche de génie. Le grand film était à portée de plume, mais il faut croire qu’entre l’encrier et une rallonge de fausse chair à écorcher, Dario n’a pas hésité 3 secondes avant de faire son choix.
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