L'Anthropologie face aux problèmes du monde moderne?
___Une terrible Jungle mais des crétins et benêts magnifiques, de "classe internationale" comme disait Lhermitte dans Le Diner de cons.
Premières remarques sans ordre, à la sortie du film, elles feront mieux sens à ceux qui ont vu le film et elles spoïlent un peu:
____Un livre de Claude Levi Strauss est souvent visible à l'écran, titré 'Anthropologie structurale deux' et son résumé tarabiscoté de SC me rappelle en effet un peu l'histoire du film:
"À côté des aspects complexes de la réalité sociale, on constate qu'il en existe d'autres où la comparaison permet de dégager des relations constantes"...
La réalité d'un peuple est complexe mais en le comparant à un autre, on découvre des constantes: la cupidité, la fainéantise, le vice, l'addiction etc.
Il croit tomber sur une tribu complexe et nouvelle, il tombe sur les même travers et tribus qu'il a quittées en Europe et il croise même des Albertine, des Québécois et des Ignace....
____Comme Klaus Kinski chez Werner Herzog et Fitzcarraldo ,c'est d'abord l'histoire d'Eliott de Bellabre (Vincent Dedienne), un jeune homme aussi extrêmement déterminé mais qui n'a pas l'intention de construire un opéra au milieu de la jungle: il veut écrire une thèse d'anthropologie sur une ethnie d'indiens perdus dans la Jungle profonde.
Le "Là-bas, en pleine jungle, je décide de construire une société nouvelle dont j'ai toujours rêvé..." de Dedienne à sa mère rappelle un peu l'optimiste Harrison Ford dans 'Mosquito Coast'. ^^
____Quand je repense au film ou le raconte, je me (re)marre.
Tout ne fonctionne pas à 100% mais quelle belle tentative et gros travail!
Je l'ai vu sans rien en savoir. Me suis décidé que sur les noms de Deneuve et Dedienne (me disant que pour que Deneuve accepte d'y jouer, il devait bien y avoir un minimum dans l'histoire et le scénario). Et j'ai bien fait.
Je craignais une comédie familiale plutôt pour enfants...et pas du tout, c'est assez politiquement incorrect et surprend dés la toute première scène.
Même si encore un film avec un colon blanc voleur, tueur et pédophile.
____Et Deneuve, quel regard! Combien doivent sacrifier et espérer qu'il se pose, ne serait-ce qu'un instant, sur eux...
____J'ai aimé d'ailleurs la scène du qui a le plus gros ...réseau entre Deneuve et Jonathan Cohen, le chef Gendarme...le moment du non-dit 'VOUS SAVEZ PAS A QUI VOUS PARLEZ?' ...où elle me rappelle le rôle de Claude Gensac en Madame la Colonel dans les Gendarmes:
"Votre réseau, c’est tout simplement l’ensemble des communautés auxquelles vous appartenez.” dit le magazine l'Etudiant, Chantal de Bellabre l'a bien compris et Cohen ne fait pas le poids.
C'est une de mes scènes favorites dans la série des 'Gendarmes': celle où Louis de Funés menace "la folle hystérique" inconnue et lui agite sous le nez un carnet plein d'amendes jusqu'à ce que Galabru l'informe sur celle qu'il a osée menacer:
Cruchot à Gensac: "...j'ai déjà vu des inconscients, des sauvages et des hystériques mais des possédées comme vous jamais. Vous êtes bonne pour la camisole de force!
Galabru: vous ne savez pas à qui vous parlez!
Cruchot: Si! à une folle!
Galabru: Non! Vous parlez à madame la colonelle de François veuve du colonel commandant de la région de Basse-Normandie! Amie personnelle du général de Rochemont et du sous secrétaire d'Etats Fouchard et de quelqu'un d'autre que je ne nommerai pas...
(...)Cruchot (fondra en obséquiosité mais pour une fois amoureuse et pas ambitieuse):
c'est moi qui ai péché par orgueil
(Deneuve fait ici une même litanie de contacts)
Albertine:
____Selon "un dilettante amoureux de la « Recherche de Proust»" (un André Vincens), "Albertine est le personnage dont le nom apparaît le plus souvent dans la Recherche".
Et en lisant sa fiche, je comprends mieux certaines vannes du films et l'allusion car:
l'Albertine de Proust est "Orpheline; elle a été élevée par sa tante qui fait partie de la bourgeoisie, son mari étant conseiller d’ambassade".
C’est une jeune fille aux "cheveux bruns et épais", aux yeux verts, bleus ou violets.
Elle a de grosses joues et « un petit nez rose de chatte ».
Elle a un grain de beauté que le narrateur ne sait pas situer précisément.
Elle est "intelligente mais le narrateur la trouve parfois mal élevée et impertinente" (...)
"Les deux jeunes gens envisagent à plusieurs reprises de se séparer, à d’autres moments de se marier. Albertine se montre de plus en plus docile et semble se complaire dans cette vie et alors le narrateur envisage une nouvelle vie pour eux deux."
....comme dans le film donc!
____Mon personnage préféré, le mieux écrit mais pas forcément le mieux joué du film est le chef des gendarmes qui va direct dans ma liste d'imbéciles heureux au côté de Pignon
Je rigole encore en me rappelant son rêve éveillé final où il s'imagine retrouver le disparu mais on voit qu'il pense encore qu'il recherche encore "un rouquin gras" (Alors que le disparu, Dedienne, est brun et maigre).
____ On a tous un double sur la planète: ton double Chinois? J'ai aimé que la mère castratrice, négative et jugeant trop durement son fils ne s'en rend compte qu'en croisant à des milliers de kms de chez elle dans la jungle, une autre mère pareille mais... Chinoise et qui engueule pareillement son propre fils, qui fait aussi le même métier qu'elle, comme le fils de Deneuve: les écailles tombent alors des jolis yeux de Catherine...
Mon premier éclat de rire a été pour la scène et le discours humaniste et plein d'espoir: 'Il-faut-ouvrir-les-bras...nous-sommes-tous-frères...-nous-pouvons-former-une-communauté'
===> qui amène à un hilarant coup de pelle et très belle entrée pour la liste de Carole de Sc "C'est fou le nombre de problèmes qu'on peut résoudre avec une pelle ! "