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Thanatomorphose est le premier et à ce jour unique long métrage du réalisateur canadien Eric Falardeau, en même temps vu les obsession et les références du bonhomme qui se verrai bien faire un porno gore et nécrophile on comprends pourquoi les producteur ne se bousculent pas devant la porte de son asile. Thanatomorphose est un film choc un peu dans la veine des œuvres de Jörg Buttgereit (Un filiation pleinement revendiquée par le réalisateur) et une œuvre qui clairement ne plaira pas à tout le monde, quand bien même dès le départ elle ne s'adresse qu'à un public restreint de films un peu malades.


Thanatomorphose c'est l'histoire de Laura , une jeune femme qui un matin, après une nuit d'amour avec son amant, se retrouve avec d'étrange tâches brunes sur le corps. Ce n'est pourtant que le début d'un long et inexorable processus de pourrissement de son corps tout entier …


Pour ce premier film doté d'un faible budget, Eric Falardeau a décidé de mettre toute les chances de son côté en concentrant l'essentiel des dépenses sur l'élément indispensable à la crédibilité et la réussite de son film, les effets spéciaux et maquillages horrifiques. Peu de personnages, un lieu unique en guise de décor, un tournage dans la continuité de l'intrigue, le jeune réalisateur savait pertinemment les contraintes inhérentes à ce type de projet et comment il pourrait au final en tirer une forme de profit artistique. Le décor unique renforce l'enfermement, l'idée de replis, l'oppression du cadre ; le tournage marathon en continuité du scénario permettra au décor de garder au fil des jours les stigmates dégueulasses de la pourriture du personnage et la comédienne quasiment toujours présente à l'écran devra souvent tourner dans des états de fatigue servant la dégradation physique et mental de son personnage. Quant au effets spéciaux et maquillages ils sont effectivement assez impressionnants et bien crapoteux renvoyant bien évidemment à la décomposition mais aussi à tout ce que notre inconscient associe aux petites grandes douleurs de l'ongle arraché à la plaie que l'on trifouille comme quand on s'arrache les croûtes d'un gros bobo. Thanatomorphose n'est donc pas un film d'horreur plaisant ; de par son sujet, son rythme et sa radicalité il pourra tout aussi bien fasciner que profondément irriter, voir faire un peu les deux en même temps comme pour le spectateur que je suis.


La décomposition c'est un long processus, très long, très très long, trop long sans doute et c'est peu dire qu'on sent passer l'heure quarante d'un film qui comporte sans doute 20 minutes de trop. Alors bien sûr le réalisateur voulait justement marqué la lente dégradation du corps reflet de l'esprit dépressif et malade, il voulait sûrement appuyer l'idée du calvaire même d'un processus lent de pourrissement des tissus mais le film reste globalement d'une longueur et d'une lenteur parfois limite rébarbative. L'une des grandes obsession du réalisateur étant les fluides corporels au point d'en avoir fait une thèse, on ne sera pas étonné de constater que ça suinte, ça crache, ça coule et ça suppure de partout dans Thanatomorphose avec tout ce qu'il faut de sang, du pue, de sperme, de cyprine et de vomi avec sans doute un tout petit excès provocateur qui personnellement me laisse de marbre. Le film n'est également pas très encourageant visuellement parlant, avec son image brut et un peu crade, sa semi pénombre permanente on sent à la fois une volonté de coller à la noirceur déprimante du propos et l'absence d'une véritable identité visuelle.


La force de Thanatomorphose n'est pourtant pas dans ce qu'il montre mais dans tout ce qu'il implique et suggère comme questionnement. Le film est à l'image du corps du personnages principale, un objet repoussant visuellement, mais obsédant dans les différents niveau de lecture qui pourront s'appliquer à ce qu'il cache au delà même du délabrement de ce qui reste visible. Le film pourra se voir comme une métaphore d'une profonde et irrémédiable dépression dans laquelle s'enferme le corps et l'esprit qui nourrit de pensées et d'idées sombres conduisant au lent pourrissement de l'estime de soit et venant altérer le corps jusqu'à en faire un objet repoussant. Il n'est pas non plus inconcevable de voir le film comme une allégorie putride de la maladie ; de tout ce qui d'un coup vient dégrader le corps et l'esprit en l’entraînant dans un lent et inarrêtable processus de métamorphose vers l'horreur. Mais le plus effrayant est peut être de considérer que dès notre naissance tout n'est finalement qu'un inexorable et lent processus de vieillissement et de dégradation des cellules, des tissus et des organes dans un processus peu réjouissant d'obsolescence programmée, vivre c'est mourir un peu, mais vivre c'est aussi et surtout pourrir un peu. Dans Thanatomorphose il sera aussi beaucoup question de désir, du mouvement attraction/répulsion des corps selon qu'ils seront objets d'excitation ou de dégoût ; le personnage de Laura se touche et se masturbe régulièrement durant le film, mais les mêmes geste ne procurent pas tout à fait les mêmes sensations selon que le corps est désirable ou une plaie purulente de chairs à nues … Cette questions du sexe et du plaisir physique lorsque le corps n'est plus un objet de désir est aussi un des axes forts de Thanatomorphose. Lorsque votre compagne n'est plus qu'une suintante figure de chairs nécrosées couverte de vers grouillants (toutefois pratique si vous êtes pêcheur à la ligne) , difficile d'avoir le moindre désir pour un corps qui pourtant parfois implore à en crever de l'amour et affection du fait même de sa dégradation.


Thanatomorphose n'est clairement pas un film plaisant à regarder, on a même la sensation qu'il prend un malin plaisir à ne pas l'être de par sa lenteur, sa relative laideur et l'horreur qu'il balance aux regards des spectateurs. Difficile toutefois de ne pas être fasciné, voir déprimer par les questions, les interrogations et les thématiques inhérentes à son sujet du pourrissement inexorable du corps, du désir et de l'esprit vers lequel nous tendons tous à plus ou moins long terme. On finira tous comme Laura et c'est peut être le plus effrayant et déprimant des constats.

freddyK
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le 15 févr. 2025

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