Le Klub des Loosers
Vis ma vie dans Second Life: ma vie d'obèse dans un mobile-home qui se crée un avatar super sexy, ma vie d'ouvrier automobile qui ouvre un cyber-bordel, ma vie d'évangéliste qui crée son église...
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le 14 juin 2012
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Kaori Kinoshita et Alain Della Negra, couple dans la vie comme au cinéma, nous propose ici la plongée dans le monde de ceux qui ont décidé de vivre dans une réalité alternative : Second Life (SL). Une sorte de Sim's augmenté, interconnecté, accueillant en son sein toutes les passions de ceux qui ne peuvent pas les vivre pleinement dans la réalité, mais aussi bon nombre de déviances: achats compulsifs, fabrication d'une poitrine XXL sur mesure pour pas un sou, prêches numériques, gérance d'un bordel, changement de sexe, kinks furry ou encore orgie numériques, SL leur permet tout.
Étrange, parfois terrifiant, percutant, les deux documentaristes posent un regard exempt de tout jugement sur le panel de personnages qui vont hanter les pixels du site Second Life et offre un reflet peu reluisant d'une partie de cette société américaine laissée pour compte. Car bon nombre des personnages rencontrés évoluent à la marge: sexualité refoulée, problèmes de santé, paupérisation, astreinte à un travail à la chaîne dévitalisant..., ce n'est pas un hasard s'ils se sont retrouvés dans cette réalité alternative.
Un film à mettre en perspective avec A Glitch in the Matrix (Rodney Ascher, 2021), explorant l'univers connexe de ceux qui croient à l'Hypothèse de simulation dépeinte dans eXistenZ par exemple, ou dans la plus connue encore trilogie Matrix.
Car c'est de cela qu'il s'agit. D'un glissement, imperceptible, vers une altérité numérique qui prend peu à peu le pas sur la tangibilité du monde réel, comme en témoignent ces images d'être déconnectés, rivés sur leur écran tandis qu'ils partagent le même toit, la même pièce. Mais aussi la paroi toujours plus fine et poreuse qui sépare le monde réel des pixels et les conséquences directes des actes numériques sur l'existence tangible (engueulades, insalubrité, mode de vie désastreux)...
Plus terrifiant encore, cette manne de millions d'utilisateurs journaliers a bel et bien attiré l'attention des géants du web et des publicistes de tous bords, voyant en eux une bête de somme résolument rentable.
Terrifiant, donc. Et superbement mis en image, jusqu'aux plans finaux prenant place dans le festival Burning Man, au sein de l'immense désert du Nevada. Un monde parallèle, cette fois-ci bien réel, où tout semble possible. Une utopie poussant comme un champignon, chaque année, au sein du Black Rock Desert. Mais à l'instar d'un Woodstock 99 (à découvrir sur Netflix), l'apparente totale liberté cache parfois de sombres vérités.
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le 5 nov. 2022
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