Donc, nous sommes dans une station spatiale en orbite autour de la Terre. Et là, un mec s'écroule avec un gros mal de bide. Il s'effondre, l'écume aux lèvres, et on voit que ça s'agite sous ses vêtements. Jusqu'à ce qu'il crache du sang et des milliers de petits vers.
Vous avez déjà l'impression d'avoir vu cette scène ?
En fait, c'est peut-être là que le film mérite son titre. Le grand paradoxe, c'est que vous connaissez déjà ce film avant même de l'avoir vu. Chaque scène a déjà été vue, revue et rerevue des centaines de fois ces quarante dernières années.
The Cloverfield Paradox est donc une successions de scènes qui sont enfilées comme des perles sans le moindre lien logique entre elles. On sent la faiblesse du scénario à chaque instant. Pas la moindre inventivité, pas la moindre idée. Alors que le monde de la saga est suffisamment ouvert pour permettre au cinéastes de donner libre cours à leur imaginaire, ici, nous aboutissons à un néant absolu. Le film enchaîne les morts violentes de personnages sans le moindre lien causal. Et comme Julius Onah est parfaitement incapable d'implanter un semblant de début d'ambiance angoissante, nous restons là à regarder ça d'un œil distrait.
Distrait, ou affligé. Les scènes ne se contentent pas d'être mal filmées et sans intérêt, elles sombrent aussi souvent dans le ridicule. Un mec qui rigole au sujet de son bras amputé, lequel bras continue de faire sa vie tout seul de son côté. L'autopsie d'un cadavre, faite par une physicienne quantique, et qui permet de trouver une boussole au milieu des boyaux. Et cette phrase qui est répétée comme un mantra pendant une partie du film : « on a perdu la Terre ! »
Il y avait bien une lueur d'espoir dans le côté mystérieux de certains événements. L'apparition de Nina et l'énigme autour de son identité aurait pu mener à quelque chose de sympa. Mais, une fois de plus, tout est torché en quelques secondes, et le scénario rejette tout mystère en employant des mots qui font intelligents mais qui, ici, sont complètement vides (« particules », « quantique », « faille inter-dimensionnelle », etc.).
L'autre lumière d'espoir envisageable concernait les scènes qui se déroulent sur Terre. Mais là aussi, avec une constance remarquable dans le vide, le film se contente de faire des clins d’œil vains aux deux films précédents sans rien apporter de plus. Un plan sur un bâtiment détruit avec une vague ombre de bestiole, un mec et une gamine qui se terrent dans un bunker : au lieu d'étoffer l'univers Cloverfield, nous sommes dans l'inutilité de références internes.
En gros, non seulement c'est déjà vu, c'est mal foutu, mais en plus c'est ridicule. Et ce n'est pas l'interprétation qui va sauver le film. Le seul point positif du casting est la présence de Zhang Ziyi, sûrement pour attirer un public chinois sans lequel un film ne peut plus être un succès international de nos jours.
En bref, en tant que fan du premier film, j'avais accueilli avec intérêt le deuxième long métrage, qui avait l'avantage de se dérouler dans le même monde tout en prenant des parti-pris de scénario et de réalisation complètement différents (hélas plombés par un dernier quart d'heure ridicule). Et c'est avec curiosité que je ne suis lancé dans ce troisième film.
La curiosité est un bien vilain défaut...