The Dark and the Wicked ne cesse de se figer, persuadé que quelque chose va naître à l’écran, sortir du rien pour peser sur le plan, perturber la lumière, faire grincer le parquet ou bêler les chèvres. Erreur, rien ne se passe, et le réalisateur, comme rattrapé par l’inertie de son geste, se dit qu’il faut remplir, surprendre, usant du jump scare et abusant de la menace en arrière-plan qui fixe le spectateur avant de disparaître quand vient le plan suivant. Une vieille femme nue, un vieil homme alimenté par tube, une biquette à trois pattes qui clopine jusqu’à rejoindre son maître qui lui brise le cou et la brûle avec ses camarades d’étable. Se déploie pendant plus d’une heure et demie une léthargie horrifique qui n’est pas sans rappeler le style d’un Ari Aster.
Car le film n’atteint jamais le malaise poisseux de The Witch (Robert Eggers, 2015) ni même la peinture familiale de la vanité humaine que l’on retrouvait, il y a peu, dans Relic (Natalie Erika James, 2020) : l’écriture des personnages s’avère des plus caricaturales et empêche le spectateur de s’attacher à eux, leurs enjeux étant à l’image de leur fixité ridicule devant un troupeau décimé qui gît dans la clairière. Quant à la puissance symbolique de l’intrigue, elle peine à emporter l’adhésion et semble davantage prétexte à une accumulation de courtes séquences dérangeantes ou voulues ainsi, que n’engendrent qu’un long et profond sentiment de lassitude.