Par où commencer ? Par la technique pure. Les plans sont plus longs qu'à la normale chez Nolan : c'est bien. A certains moments, la mise en scène est plutôt sympa et originale : bravo. Mais maintenant, il s'avère que Nolan s'est mis en tête d'utiliser des focales plus longues pour les gros plans. Du coup, dès qu'un acteur a un mouvement de tête, même léger, on peut être sûr que le focus sera à l'ouest pendant plusieurs secondes… Ajouter à cela des cadrages totalement ridicules, voire honteux, pour la quasi totalité des plans serrés et vous obtenez quelques moments de rires alors que Nolan essaie de faire monter la tension.

Question lumière, prévoyez les lunettes de soleil : il fait jour dans 3/4 des plans. Et pour un film qui dure 2h30, ça fait beaucoup ! Surtout quand le film a pour personnage principal 'the DARK Knight'. On laisse quelque peu tomber le bleu habituel de Nolan pour un marron crade, plutôt en rapport avec le scénar, mais tellement pas beau…

Venons-en donc au plus important, l'histoire…

Le problème du Joker a été réglé à la fin de 'The Dark Knight' donc on n'en parle plus. Par contre, l'affaire Two-Face/Harvey Dent est toujours d'actualité, du moins au début du film : grâce au mensonge concernant sa 'mort héroïque', la ville de Gotham s'est réveillée et a réussi à se débarrasser du crime organisé. Oui, comme ça. Et donc la police n'a plus grand chose à faire. Ben quoi, c'est pas ça la seule raison d'existence de la police : combattre les méchants qui font du trafic en tout genre ? Bref, tout va pour le mieux. Mais pas pour Bruce Wayne qui a choisi la séclusion dans son manoir parce que la femme qu'il aimait est morte. Batman a donc rangé son costume et été depuis longtemps oublié par tous (ben oui, il y a 7 ans entre les 2 films donc c'est quand même trèèèèès long pour le citoyen lambda ; et puis c'est pas comme si Batman était un personnage inoubliable...).

Mais c'est à ce moment-là qu'un grand méchant décide de débarquer : Bane. Alors on a droit à un prologue d'introduction, comme dans TDK. Le méchant fait de longs discours pour expliquer qu'il veut tout faire exploser et rendre la société plus égalitaire, comme dans TDK… Le problème, c'est qu'il manque méchamment de charisme et possède une voix absolument abominable. Et en plus, il passe après le Joker. Donc tant qu'à faire, autant reprendre son plan et le modifier un peu sur les bords histoire de pas donner trop l'impression de copier.

Donc Bane décide de mener la révolution afin d'abolir les distinctions sociales et de mettre fin à la décadence de Gotham. Quoi de mieux pour cela que de prendre d'assaut la Bourse puis de faire sauter un terrain de foot US en plein match pour pouvoir annoncer à tout le monde qu'il vient d'armer une BOMBE NUCLEAIRE et de tuer la seule personne capable de la désamorcer. Oui, oui : une bombe nucléaire. Ben, c'est un peu obliger d'un point de vue scénaristique quand le grand méchant fait pas vraiment peur...

Il s'ensuit alors toute une transposition moderne de la Révolution Française mais aussi de la période de la Résistance. Mais pas trop non plus, public américain oblige. On n'échappe donc pas aux poncifs du genre et aux clichés bien lourds. Mais le pire est la quantité incroyable d'incohérences que présente la situation :
- Bane affirme vouloir lancer une révolution des classes mais quoi qu'il advienne, il a bien expliqué dans ses monologues qu'il souhaite en fait tuer tout le monde avec sa bombe nucléaire ;
- On ne voit jamais comment la population réagit face à cet individu quelque peu louche. Les seuls représentants de la classe pauvre sont les SDF et les prisonniers, qui prennent évidemment part aux côtés de Bane.

Face à ces événements, Wayne décide qu'il est temps pour Batman de reprendre du service et ça n'a pas vraiment l'air de créer de l'intérêt chez qui que ce soit parmi les habitants de Gotham (vite fait la police mais c'est tout) ; Catwoman pose également ses valises ; un jeune et gentil policier idéaliste souhaite faire changer les choses ; un autre ne pense qu'à une chose : tuer celui qui a assassiné Dent (comprendre Batman) ; une femme d'affaire veut reprendre les règnes de Wayne Enterprises ; et notre valet préféré décide de se faire la malle en plein milieu du film parce qu'il n'est pas d'accord avec les décisions prises par Wayne...

Ca fait beaucoup de personnages, beaucoup d'histoires différentes à présenter. Beaucoup. Trop. Toute cette exposition prend énormément de temps (les dialogues de Nolan et la musique incessante et pas inspirée de Zimmer n'aidant évidemment pas) et les personnages apparaissent fades et creux. Ce nombre très important de personnages principaux entraîne quelques conséquences assez lourdes : ceux qui ne s'en sortent pas meurent de manière aussi pathétique que des personnages secondaires (souvent off-screen ; parfois dans un accident de la route : oui oui). Pire encore, le temps de présence à l'écran de Batman ne fait qu'en pâtir : il est là sur une grosse scène au début, disparait ensuite pendant une bonne heure, et revient quand même sur la fin…

D'ailleurs, la construction globale du film me semble assez caduque. Beaucoup de scène semblent déplacées ou mal rythmées. Mais pour essayer de palier aux zones d'ombre que cela peut créer chez le spectateur, Nolan s'assure que chaque élément important du scénario soit repris par au moins deux dialogues différents. Et il en ajoute une couche en insérant des flashbacks à tort et à travers des deux opus précédents. On doit vraiment être bêtes. Ou alors Nolan est un gars hautain...

Et comme pour ces films précédents, seuls les grands thèmes sous-jacents importent vraiment à Nolan : l'organisation des individus dans une société sans règle, l'injustice et les inégalités, la lutte des classes sociales… Oui, c'est un film sur Batman, pourquoi ?

Au final, du point de vue de Nolan, toute institution est vouée à l'échec : 'The League of Shadows' n'est constituée que de fanatiques ; la police est corrompue ou bien incompétente ; le gouvernement annonce qu'il n'interviendra pas dans cette situation terroriste ; Wayne Enterprises est un échec financier, etc. La seule solution, toujours selon Nolan, est de prôner l'individu et sachant qu'il ne peut pas survivre dans le système, il doit devenir un renégat et suivre l'exemple de Batman (petit Robin)…

Vous l'aurez compris, cette conclusion de la trilogie Batman version Nolan ne m'a pas convaincu. Et ce vieux happy-ending comme je n'en avais pas vu depuis longtemps passe très très mal… Sérieusement, le coup du sacrifice 'Je vais éloigner la bombe le plus loin possible sachant que je vais mourir' puis la double révélation 'Je suis Robin'/'Ah mais en fait, je vous ai eu, j'ai réussi à me sauver, me faire la gonzesse et vivre pépère au soleil' est assez osée. Dans le mauvais sens...
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le 25 juil. 2012

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le 30 juil. 2012

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