Trois petits tours et il s'en va.
Christopher Nolan décide d'arrêter la saga Batman qu'il a reprise depuis 2005. Pour clouer le spectacle, voilà qu'il a concocté près de deux heures quarante des dernières envolées du chevalier noir dans le monde impitoyable et corrompu de Gotham. Avec plus ou moins de tact.
Enclenché comme troisième volet de la série, la narration de The Dark Knight Rises risque de laisser plus d'un gus sur le carreau si celui-ci n'a pas vu les deux opus auparavant. Harvey Dent, alias Double Face, est mort, et un mercenaire du doux nom de Bane prétend rendre justice aux citoyens du peuple en profitant de la mise à prix de Batman.
Autant dire que le nouveau méchant était très attendu suite à la bonne prestation de Heath Ledger en Joker iconoclaste et ravagé par une folie terrifiante. Si le casting de Tom Hardy avait bonne allure sur le papier, une fois devant la caméra, on regrette le Bane de... Batman & Robin. Ni le costume ni le physique de l'acteur font tache, néanmoins sa voix commet une fausse note. L'idée d'avoir les cordes vocales à moitié cassées, les lèvres à peine tenues par le masque pouvait prêter notre imagination à un Bane rocailleux, bestial. Ici, Tom Hardy sonne comme Apu Nahasapeemapetilon, le vendeur indien des Simpsons. Inutile de démolir la ville ni de briser les côtes de Batman, les nôtres suffisent.
Autre plaie béante : Marion Cotillard. Notre plante verte préférée des films américains fait son retour et prouve qu'elle n'est pas seulement décorative, mais qu'elle assume une performance dite d'actrice. Sauf qu'elle persiste à rester une plante verte, en plastique qui plus est. Du long rythme crescendo voit-on davantage Cotillard sur l'écran, ravissant nos zygomatiques déjà échauffées par les annonces promotionnelles émanant de Tom Hardy. Cette fois-ci, elle se hisse au sublime. Le coup d'éclat, la mort de son personnage, rendra The Dark Knight Rises inoubliable.
Car ce n'est pas le rythme incessant, au montage haché comme le boucher qui laisse trop de gras sur le jambon, qui apportera une once d'insatisfaction au final retentissant. Ce n'est pas la paresse de Hans Zimmer, qui a laissé la piste audio d'Inception jouer durant tout le long métrage, qui poussera à l'agonie. Ce n'est pas Cillian Murphy qui fait une énième apparition pour souligner l'aberrance de son personnage, sorti du contexte de l'histoire. Ce n'est pas Liam Neeson qui donne encore l'impression que le monde l'emmerde au plus haut point. Ce n'est pas le bourrage de crâne de Nolan sur Nightwing, implicite à chaque réplique de Joseph Gordon-Hevitt qui irrite nos cornées. Ce n'est pas le final désespérant, tiède, lâche, renvoyant au script bavard et soporifique du film, qui nous laisse pantois.
Non, ce film restera dans les annales pour la performance de Marion Cotillard. Elle a réussi à occulter l'ambiance glaciale de Gotham, les véhicules au design brut et rétro-futuriste, Michael Caine et Morgan Freeman.
Bien joué, Nolan.