The Dead Girl par abarguillet
Présenté le dernier jour du Festival du film américain de Deauville en septembre 2007," The dead girl" de Karen Moncrieff, qui a obtenu le Grand Prix, ne m'a pas pleinement convaincue. Destins croisés de cinq femmes qui, à la suite d'une découverte macabre - le corps assassiné d'une jeune femme - vont être mis en perspective et nous être contés en parallèle comme des fragments autonomes. Toutes ces femmes sont des victimes : l'une ( Toni Collette ) est tyrannisée par sa mère infirme, une autre cherche en vain à faire le deuil d'une soeur, une troisième ( Mary Beth Hurt ) s'aperçoit que son mari est un serial killer et s'efforce de cacher les preuves de ses crimes, enfin la mère de la jeune fille morte tentera de comprendre comment ce malheur a pu se produire. Enfin, il y a l'histoire de cette "dead girl " nommé Krista, interprétée par Brittany Murphy qui, tel un diamant noir, reflète les sombres lumières de ces existences éclatées : ayant fui les avances d'un beau-père, elle va se trouver prise dans un réseau de prostitution, se droguer et s'enliser dans la déchéance. La mort, elle la croisera alors qu'elle portait à son enfant, qu'elle avait placé dans une famille d'accueil, un petit cadeau d'anniversaire...
Tout cela est tragique et, pas un instant, on ne sort de cette malédiction qui semble peser sur ces êtres marqués par la fatalité Ce film ténébreux et funèbre nous décrit, avec un sens aigu de la narration et en assumant avec maîtrise la peinture de ces cinq portraits, les images d'une douleur quotidienne qui ne laisse aucun détail au hasard, pas même les plus insoutenables. L'enjeu de la cinéaste n'est nullement d'enquêter sur le meurtre de la jeune femme, mais sur les conséquences que cette mort aura sur les quatre autres personnages, l'ombre portée par la découverte de son cadavre. Néanmoins, Karen Moncrieff ne parvient pas à prendre suffisamment de hauteur, trop prisonnière de son narratif, pour inciter à une réflexion plus profonde sur le sens de ces vies, sur le pourquoi de la violence à laquelle ces femmes sont confrontées.
De ces existences malmenées, il est certain que celle de la mère de la victime est la plus émouvante, incarnée par une Marcia Gay Harden qui s'est pleinement investie dans son rôle. Mais il reste que la fin est décevante, bâclée, que cet infini malheur ne parvient pas à déboucher sur une consolation quelconque, ne s'ouvre pas sur une dimension plus large, moins dévastée, propre à laisser entrevoir une renaissance possible ; film ravageur s'il en est, habité par une douleur aveugle, dont on sort dans un état de stupeur. Cependant, on ne peut nier qu'un talent se profile avec force à travers un film coup de poing et que se révèle, dans cet océan de larmes, un tempérament de metteur en scène.