La démarche de Kent Mackenzie est clairement orientée vers un cinéma hybride, partagé entre une mise en scène propre à la fiction et une base documentaire qui vient régulièrement complémenter le flot d'images. L'introduction est d'ailleurs composée photos d'Amérindiens de la fin du XIXe / début du XXe siècle — de l'époque des westerns disons — prises par le photographe et ethnologue Edward Sheriff Curtis, avant de suivre une trame très simple, une soirée d'un petit groupe de jeunes Amérindiens à Los Angeles, du vendredi soir au samedi matin. Dans sa forme de chronique d'une communauté américaine, "The Exiles" m'a beaucoup fait penser à ce que Charles Burnett produira en 1977 avec "Killer of Sheep", côté Afro-américains.
Le film est assez sec, on suit ces personnages dans leurs activités un peu banales, ils flirtent, ils picolent, ils dansent, ils se battent... Rien de très passionnant, mais le tout est entrecoupé de témoignages en voix off, qu'on peut imaginer résulter d'une captation documentaire, éclairant les états d'âmes et les aspirations de différentes personnes. On commence à ce titre par un personnage féminin, Yvonne, qui évoque sa vie, ses rêves, sa grossesse, et ses difficultés en tant que femme qui voit son mari pour qui elle se tue à la tâche quitter la maison pour sortir avec ses potes.
J'aime bien l'image que le film renvoie du Los Angeles des années 50 (Thom Andersen demandera les droits pour son kaléidoscope "Los Angeles Plays Itself"), et tout particulièrement quartier de Bunker Hill juste avant sa destruction / reconstruction, un quartier résidentiel avec ses demeures délabrées de style victorien qui figurent souvent dans les œuvres d'écrivains américains comme John Fante et Charles Bukowski. Le film n'est pas forcément très entraînant, il est un peu difficile à suivre même jusqu'au pèlerinage au sommet de Hill X, mais il donne un aperçu d'une interprétation du rêve américain très originale.