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J’aime bien les films de la lose. Ceux qui mettent en avant un protagoniste paumé, un Jeffrey Lebowski en puissance, qui accumule les merdes et ne sait pas trop bien comment les gérer, simple qu’il est. Le genre qui s’entoure de couteaux pas bien plus aiguisés que lui-même, et échafaude avec eux des plans qui n’ont aucune chance de marcher. C’est donc avec plaisir que j’ai retrouvé cette poisse benête dans ce second film de Kim Jee-Woon, une comédie sociale où Song Kang-Ho montre déjà qu’il est très à l’aise dans la bêtise involontaire.
C’est l’histoire de Dae-Ho, un type de la lose donc, qui se fait martyriser par son père et son patron, et qui n’ose déclarer sa flamme à sa collègue populaire. Alors Dae-Ho, pour apprendre à se défendre des vilaines clés de bras de son boss, et pour pouvoir corriger les torts qu’il voit dans la rue, décide de rejoindre un entraîneur de catch dans un club miteux. L’occasion parfaite pour se créer une personnalité fictive, masquée, qui pourrait affronter les peurs du réel. Un alter-ego dont le costume prodigue le courage nécessaire pour mettre fin à ses tourments.
Le catch est un choix particulièrement pertinent, car extrêmement populaire en Corée pendant un temps grâce à l’influence de la scène japonaise, avant que le public ne s’en désintéresse après avoir compris que le tout était mis en scène. Des combats factices donc, qui intègrent parfaitement le récit. Dae-Ho a beau savoir faire un suplex, ça ne l’aidera pas quand son adversaire hors du ring ne jouera pas le jeu. Ses chorégraphies n’ont pas d'applications pratiques, et l’entreprise est vouée à l’échec, au grand dam du jeune homme.
Foul King est une histoire de fuite en avant, faite de travellings latéraux qui suivent Dae-Ho dans ses errances. Plutôt que de chercher de véritables solutions à des problèmes qui dépassent l’individu (les conditions de travail, proches de celles qui sont traitées moins caricaturalement dans About Kim Sohee), notre protagoniste prend la voie du paraître. On balaye les emmerdes sous le tatami en espérant que ça fera le boulot.
Une comédie sociale qui se pare de scènes de combat sacrément bien menées. Le catch, factice, dans le film, fictif, n’empêche pas la mise en place d’une tension lorsque les collants sont enfilés, grâce à la maîtrise formelle de celui qui nous livrera A Bittersweet Life ou J’ai Rencontré le Diable dans les années qui suivent.
Une œuvre drôle, touchante, et qui donne déjà les prémices d’un grand réalisateur en devenir.