Quelques mois seulement après un Tully couçi-couça, Jason Reitman revient avec un projet plus ambitieux : la chute de Gary Hart. Alors le papa du hit Juno a-t-il enfin réalisé quelque chose qui ne soit pas complètement éclipsé par son premier succès ? Pas du tout… mais bon, glad you tried.
Si le nom de Hart n’évoque pas grand-chose au gaulois moyen, il s’agit pourtant d’une des histoires de chaos politique les plus notables du pays du coca en bouteille de 10L. En 1988, le sénateur démocrate Gary Hart était donné grand favori contre George Bush. Intelligent, passionné, orateur-né, sa campagne a toutefois déraillé quelques jours seulement avant les primaires démocrates suite à une série de révélations sur ses infidélités conjugales. Jason Reitman en profite pour dresser un portrait de l’époque à travers un récit choral afin (d’essayer) de capter le moment de basculement idéologique – tant du côté de la presse que du public et des politiques eux-mêmes – où une campagne est passé d’une confrontation d’idées à un déterrage frénétique de casseroles.
Orchestré par un Hugh Jackman excellent en Harp, jouant un registre sacrément étendu d’émotions (Reitman se trompe rarement sur ses rôles centraux, en même temps ils tiennent toujours ses films), ce drame voit valser une quinzaine de personnages principaux, entre les journalistes, l’équipe de Hart et sa famille. Toutefois ceux qui s’attendaient à une farce politique d’une ironie grinçante – je plaide coupable – en seront pour leurs frais, l’explosion en vol de ce favori a fait beaucoup de mal à toutes les personnes qui y ont été embarquées.
Au-delà de la réal en vieille pellicule sans faille mais aussi sans éclat, le style de Reitman brille dans l’écriture, en brossant une galerie de “gueules” crédibles tout en restant en surface, par manque de temps à consacrer à chacun surtout. Rien de lassant, mais rien de particulièrement nerveux dans cette histoire dont on connaît la fin avant qu’elle ne commence. Pour sa défense, son message intéressant reste suffisamment factuel et bien dosé que pour ne pas faire sermon et en se focalisant sur un événement plutôt qu’un personnage, on évite très largement une structure de biopic.
Un peu lisse, loin de la folie d’un Silvio et encore plus éloigné de la reconstitution maniaque d’un Zodiac par exemple, The Front Runner porte un regard intéressant sur les arcanes du pouvoir mais noie dans une “pudeur de gazelle” le grain de folie qui aurait pu le rendre mémorable.