Quand l'art du contrepied surpasse l'art du bricolage. Michel Gondry est un cinéaste iconoclaste, un amant remarquable de ceux qui vous surprennent à chacune de vos rencontres. Sortir à 6 mois d'intervalle une superbe Épine dans le coeur, documentaire sur sa tante institutrice dans les Cévennes qu'une poignée de salles a eu la chance de découvrir et un blockbuster hollywoodien partagé par plus de 600 écrans est en soit un exploit remarquable. Il devient même unique lorsque le cinéaste conserve une patte, un symbole reconnaissable d'entre tous à la fois par la confrontation monde/sur-monde par les procédés de bricolage dont Gondry est le maître d'orchestre farceur d'une atmosphère singulière.

Production hollywoodienne oblige, les fans de Gondry risquent d'être assez déçus : son cinéma personnel semble en partie dilué par les impératifs du marché. C'était sans compter sur la participation de Seth Rogen et Evan Goldberg, joyeux luron échappés du gang Appatow qui jouissent d'une véritable liberté dans l'adaptation de l'émission de radio des années 30 "The Green Hornet".

Un film de héros non supers qui ressemble parfois plus à un buddy movie qu'à une énième adaptation des figures emblématiques de Marvel. Un héros sans pouvoir particulier comme ils le sont souvent dans ces films : perdus à la lisière entre deux mondes, en l'occurrence celui de la vie réelle et d'un luxe abrutissant, le héros Britt Reid (Seth Rogen) décide en compagnie de l'hilarant bricoleur Kato (Jacky Chou) de combattre le crime personnifié par le superbe méchant Christopher Waltz.

La sauce prend rapidement, la complicité apparente entre Rogen et Chou permet grâce à des dialogues percutants que ce soit pour souligner la bêtise de Rogen, fils-à-papa découvrant le monde ou les découvertes de l'uluberlu Jacky Chou, un Michel Gondry héroïque qui compose sur le même ton que Jackie Chan dans Rush Hour. Si la patte de Michel Gondry est moins palpable que lors de ses précédents opus, on retrouve les forces de son cinéma : une aversion pour la complexité, les effets numériques parfaits et une réalisation terre-à-terre.

Le film se mue peu à peu en véritable patchwork qui additionne les univers pour un rendu au final homogène qui met en valeur des acteurs en roue libre dont les seconds rôles (Christopher Waltz hilarant et Cameron Diaz surprenante) ne servent pas de simples faire-valoir. C'est peut-être la plus grande force du film, du cinéma qui ne se prend jamais au sérieux (un véritable pied-de-nez au Dark Knight) tout en accouchant de scènes venues d'ailleurs. Si la poésie et l'émotion ont fait place à l'humour et l'action, le charme et l'élégance de Gondry reste intact, un plaisir aussi innocent et naïf qu'un vinyle de musique classique joué sur un canapé éjectable.

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le 13 janv. 2011

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