Le dernier film de Joe Dante destiné aux salles obscures remonte au très inégal (mais parfois brillant) Les Looney Tunes passent à l’action. Suite à ce dernier, rien à se mettre sous la dent venant du père des Gremlins, à part deux épisodes plutôt convaincants de la série Masters of Horror. Dire que ses films manquent au paysage cinématographique actuel est peu dire. Faisant partie de la crème des réalisateurs ayant contribué à l’âge d’or d’Amblin avec, entre autres, Steven Spielberg ou Robert Zemeckis. Il est de ceux qui savent le mieux conter ces histoires fantastiques vécues par des personnages enfants ou adolescents. Un genre qui a fait le bonheur des années 80, avant de quasiment (totalement?) disparaître. Pourtant, malgré le programme alléchant qu’est prêt à offrir The Hole, le film aura connu beaucoup de déconvenues avant de pouvoir arriver sur le territoire français… directement en Blu-ray et DVD.

Tourné en 3D en 2009, le métrage était la promesse d’un relief au service de la mise en scène, et non un simple gadget. Joe Dante étant un cinéaste habile avec l’espace, la proposition était plus que tentante. Seulement, peu de temps après le succès d’Avatar, Hollywood s’est engouffré dans l’argent facile que représente la diffusion 3D avec des conversions précipitées et bâclées de grosses productions qui n’en demandaient pas tant. De quoi minimiser l’argument du relief face à la concurrence. En plus à cela, s’ajoute la sortie de Super 8 qui, de par sa réussite formelle et son succès public, aura fini de mettre dans l’ombre le projet de Dante. De malheureuses coïncidences qui auront poussé le film à sortir en catimini dans les salles américaines, le destinant alors à un échec commercial. Il aura donc fallu attendre 2012 pour qu’enfin l’œuvre sortent en France. À l’heure actuelle, seuls quelques privilégiés pourront profiter du film en 3D, tel que le souhaitait son réalisateur.

Le récit est celui de Dane, un jeune ado, et de son jeune frère Lucas qui emménagent avec leurs mère Susan dans un quartier d’une petite bourgade américaine sans histoires. Les deux garçons accompagnés de la girl next door Julie (qui ne manquera pas de taper dans l’œil du plus âgé), découvrent une mystérieuse trappe dans la cave de leur nouvelle maison. Dés lors qu’ils jettent un regard au puit qu’elle cache, d’inexplicables événements commencent à avoir lieu.

Le substance même de ce synopsis ne peut que titiller les amateurs de Gremlins, d’Explorers, ou de Panique à Florida Beach. Et ils auront bien raison tant l’on se retrouve en terrain connu du cinéaste. L’arrivée des nouveaux résidents permet de mettre en place les fragiles relations de cette famille déchirée. De simples déballages de cartons suffisent pour montrer les difficultés qu’éprouve cette mère à imposer des déménagements trop fréquents à ses fils. Tout n’est pas dit sur les motifs réels de ces nombreux déplacements, mais tel l’adolescent qu’est Dane, on refoule parfois une partie de la vérité. La trop courte durée (1h30 de métrage) met cependant à l’écart certains personnages, Susan surtout. D’autres sont carrément éclipsés du récit, la famille et les amis de Julie ont autant de temps à l’écran que le caméo de Dick Miller (l’obligatoire habitué de la filmographie de Joe Dante).

Quand le gouffre, découvert au hasard d’une chamaillerie, se manifeste enfin, les deux frères et la jeune voisine commencent des expérimentations en bricolant avec les affaires traînant par là. Ce plaisir de la découverte innocent est bien l’héritier de ce sentiment si nostalgique que l’on éprouve à la vision des Goonies ou de E.T. . Seulement, ils ne réalisent pas pour le moment la portée de leur acte… Ils ont ouvert un passage vers un mal ancien qui va vite se manifester au prés d’eux.

C’est dans ces moments que tout l’art de Joe Dante est déchaîné. Appuyé pas une image sublime et des effets spéciaux physiques old school, le film arrive à illustrer les peurs primaires avec une patte graphique que l’on avait plus l’habitude de voir dans les films d’horreurs moderne. La séquence de la marionnette de Clown est à ce propos quasiment sortie tout droit de Gremlins.

L’influence des cartoons dans la carrière de Dante n’est plus à démontrer, et elle permet ici de matérialiser les phobies des personnages. La perception enfantine de la peur prend alors une forme démesurée et exagérée, une vraie perversion du réel. Cette imagerie est poussée à son paroxysme dans le final du film qui propose un décor difforme aux perceptives folles et un méchant tout en silhouette que l’on perçoit avec peine. La carrure impressionnante découpe avec brutalité l’écran pour un rendu des plus menaçant. Dante joue de ce cadre avec des plans qui peuvent prendre le spectateur par surprise, ou verser dans l’iconique le plus grisant. Si une seule scène devait justifier de s’attarder sur The Hole, c’est bien celle-là.

Même s’il ne s’agit pas du meilleur film de Joe Dante, ce qui compte est bien qu’il soit de retour aux affaires avec une œuvre digne de ses précédents travaux. On est face à un conte d’épouvante aux délices graphiques rares qui fera parfois vibrer la fibre nostalgique des amoureux des 80′s, grâce à ses personnages finement croqués. The Hole aurait mérité une visibilité plus grande que ce à laquelle il est contraint. Reste à espérer pour le futur du cinéaste, une exposition digne de son talent.
Zhibou
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le 28 juin 2013

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