Ashley C. Williams, un nom à retenir ?

Contre toute attente, "The human centipede (first sequence)" est une belle leçon de cinéma ; en effet, à l'heure où les producteurs se plaisent à miser dans la surenchère de tout, quitte à faire du rythme un simple artifice ("Avengers" est à mon sens le meilleur exemple de cette débauche), Tom Six propose ici quelque chose de très simple et l'approfondi au point de prévoir trois films au total pour une même idée. C'est merveilleux.

Le scénario est hyper simpliste ; sa richesse ne tient pas en de nombreux rebondissements mais bien en l'exploitation sage (peut-être trop sage?) des situations et des lieux. Avec peu, il construit beaucoup. L'auteur ajoute à cela des personnages simples, ne s'encombre pas de sous intrigue idiote par leur biais, non, ici on est dans la survie pure et dure. Autre détail amusant, c'est la façon dont le procédé médical est expliqué ; réaliste ou pas, cela n'a pas d'importance, Tom Six se contente de démontrer une théorie absurde grâce à la magie du cinéma (si l'on veut bien croire en un Hobbit, pourquoi pas en un mille-pattes humain ?). La fin paraît peut-être un peu facile mais ne dérange pas plus que cela, de même que l'incursion de deux éléments perturbateurs paraît relativement logique et fait même écho, comme l'affiche, au classique "Psycho".

La mise en scène est en adéquation avec le sujet : simple. Tom Six a bien compris qu'il n'était pas nécessaire de faire trembler la caméra pour provoquer l'angoisse, au contraire, sa caméra, il s'en sert comme moyen de faire peur. Comment ? justement parce qu'elle semble pouvoir tout montrer sans rien cacher, chaque moment où le docteur s'apprête à commettre le plus terrible on se dit : 'oh non, je vais devoir regarder ça'. Et vous savez quoi? Tom Six est un génie. Parce que plutôt que de se complaire dans une pornographie sanglante, il coupe et passe au plan suivant. De gore, il n'en est pas tellement question, quelques scènes sanglantes, oui, mais si peu nombreuses. Le réalisateur suggère principalement et installe son ambiance autrement que dans les viscères... Ses atouts sont son idée de mille-pattes, son personnage et ses situations simplistes. Il mise donc là-dessus avec sagesse (trop?). J'ai cru lire un peu partout que c'était filmé comme un téléfilm, je dirai plutôt que c'est filmé comme... il y a 20 ans ! Les acteurs sont bons aussi ; j'ose à peine imaginer comment le réalisateur a pu composer son casting : apparemment beaucoup de jeunes actrices sont parties pendant l'audition en voyant les schémas du docteur. En tous cas, ils sont tous courageux, y compris celui qui tient le rôle du méchant (et qui le joue avec ses tripes).

Enfin, l'on peut s'interroger sur le cinéma grâce au film de Tom Six ; c'est un peu dommage, mais beaucoup de gens ont qualifié ce film de véritable purge alors que dramaturgiquement et scéniquement parlant, Tom Six est très académique. Cela revient à dire : peut-on parler de tout ? Il y a clairement des sujets qui fachent, d'autres qui plaisent. Il suffit de voir la course à oscars : les films qui reçoivent le plus souvent un prix sont ceux qui parlent de choses dures de la vie, réalistes, des sujets graves, émouvants, des personnages qui ont subi la misère mais qui s'en sont sortis... "The human centipede (first sequence)" est un simple film d'horreur, un survival clinique, partant d'une idée stupide, une blague, et n'allant nulle part. Mais peut-on blâmer un film pour ne parler de rien, pour être purement absurde ou encore pour être un peu dégueulasse? Ce serait un peu comme dire à quelqu'un : ce que tu dis ne m'intéresse pas (parce que je ne suis pas d'accord avec toi, parce que tu ne fais que rigoler et tu n'abordes jamais les sujets graves, ...) , alors je vais t'éviter jusqu'à la fin de ma vie. Moi, je trouve ça dommage.

Bref, "The human centipede (first sequence)" est un film assez fun, décomplexé, difficile à regarder bien que ce ne soit pas gore. J'espère que le second volet est à la hauteur.