The Kid
5.6
The Kid

film de Vincent D'Onofrio (2019)

À la frontière du grand western



  • J'ai jamais retenu cette fille contre sa volonté. À aucun moment. Je lui ai dit qu'elle pouvait partir quand elle voulait. Vu qu'elle est de la famille, j'ai jamais vraiment participé. J'ai demandé à Oran de l'essayer pour moi. C'est important dans ce commerce, faut s'assurer qu'elles se cassent pas en deux. Elle s'est pas cassée. Elle est très souple. Hahaha...

  • Je viens de tuer un homme qui était autrefois mon ami. C'était dur. Te tuer sera facile.




Tu vas t'imaginer qui tu seras quand tout ça sera fini. Pas ce que tu es, ce que tu seras.



Avec The Kid, le comédien Vincent D'Onofrio revêt la casquette de réalisateur pour proposer un nouveau récit au célèbre hors-la-loi de l'Ouest américain : "Billy The Kid", ainsi qu'à son légendaire bourreau, le shérif du comté de Lincoln : "Pat Garrett". Une énième adaptation qui réussit à se démarquer des nombreuses autres propositions déjà existant en concentrant l'intrigue principale sur un élément purement fictif. Écrit par Andrew Lanham, le récit présente un duo de personnages inventés pour l'occasion qui se retrouvent malgré eux spectateurs des événements historiques réels encadrant la capture du célèbre bandit. L'histoire met au premier plan les adolescents Sara Cutler (Leila George) et Rio Cutler (Jake Schur), contraints de fuir après avoir tué leur père pour avoir battu à mort leur mère. Un méfait que leur oncle Grant Cutler (Chris Pratt) compte bien leur faire payer en se lançant à leur poursuite. Une débandade qui va entraîner le frère et la sœur sur la route de Billy the Kid (Dane DeHaan), alors en pleine confrontation avec le shérif Pat Garrett (Ethan Hawk). Une histoire fictive greffée à des incidents réels apportant une prémisse captivante avec le regard inexpérimenté du jeune Rio qui offre un œil dramatique rafraîchissant aux événements. Une toile de fond sagace dans laquelle on délaisse le folklore légendaire des deux figures mythique du Far West, pour mieux se concentrer sur la psychologie des deux hommes.


Un portrait intrigant d'une intelligence bienvenue où on explore la responsabilité qui découle d'un acte proscrit par rapport aux jugements de la société auquel chaque individu est soumis. L’obligation de répondre aux actes, qu'ils soient initiateurs de dégâts ou pas. Sommes-nous responsables de l'ensemble de nos actes ? Une obligation de responsabilité pour l’individu qui doit faire face aux conséquences de ses actes. Seulement, lorsque celui-ci se fait sous la légitime défense ou selon une injustice, le questionnement sur la moralité vient-il l'emporter sur l'infraction de la loi des hommes, ou bien encore sur la loi de Dieu ? Trouver des circonstances atténuantes n'est-il pas le signe d’une défaillance dans le système qui vient en quelque sorte consentir à favoriser le mal ? Avons-nous le droit d’échapper à nos obligations pour une raison apparente quelconque ? Des questions qui trouvent des réponses différentes entre le jugement moral de Kid ou celui de Garrett. Pour autant, aucun des deux hommes n'est dupe, la justice entraîne son lot d'injustices et de souffrances, tout comme la vengeance entraîne son lot de conséquences et là aussi de souffrances. Un système imparfait à l'image de ceux l'ayant conçu où chacun trouve sa propre justification morale pour se donner bonne conscience. Le bien est teinté de sang. Le mal est teinté de lumière. Personne n'est innocent. Une dualité traumatique pour Rio qui ne sait pas vers qui se tourner afin de l'aider à vaincre son oncle : le hors la loi Billy The Kid, ou bien le shérif Pat Garrett ?



Tu te dis que... La seule raison pour laquelle t'as pas peur de ce qui va arriver, c'est que tu peux rien faire pour que ça ait le moindre sens.



Vincent D'Onofrio réalise un excellent western à la portée dramatique brillante auquel il apporte des dialogues intéressants et une réalisation alléchante sur laquelle s'ajoute des confrontations percutantes. La photographie de Matthew J. Lloyd est honorable. Les décors d'Edward McLoughlin sont convaincants de même que les costumes de Ruby Katilius. Une élaboration technique savamment appuyée par l'excellente composition musicale de Latham Gaines et Shelby Gaines, qui se présente comme une mélodie mortifère et tragique. Un ensemble de qualité à la portée intimiste qui y aurait gagné à se tourner vers davantage de grandeur. Le rythme est bien géré. Les rebondissements s'enchaînent efficacement avec des fusillades réalistes. La violence n'est jamais sublimée. La gravité l'emporte sur le jouissif ce qui ajoute de l'ampleur et de la dissension à chaque événement. Une animosité qui n'est jamais artificielle pour un déchaînement agressif faisant écho avec la dramaturgie explorée par le récit. En témoigne l'évasion haletante et dure du Kid; où encore la confrontation finale de Garrett, qui lance un compte à rebours qui augmente le rythme cardiaque du spectateur et par la même la tension du duel. Deux excellentes séquences !


Vincent D'Onofrio dirige d'une main experte sa distribution en faisant revenir au-devant de la scène westernienne les comédiens Ethan Hawk et Chris Pratt, qu'il a rencontrés trois ans plus tôt sur le tournage du remake des Sept Mercenaires. Ethan Hawk sous les traits de Pat Garrett est génial. Le western va décidément très bien au comédien. Difficilement discernable on ne cesse tout du long de se demander s'il incarne quelqu'un de véritablement juste et respectable. En tout cas, Garret a raison, la réalité n'a pas d'importance, ce sont les histoires qu'ils racontent qui comptent. Dane DeHaan pour Billy the Kid est parfait. Le comédien est frissonnant de crédibilité. La dualité entre DeHaan et Hawk fonctionne à merveille. Deux acteurs qui assurent ! Ils sont rejoints par le jeune Jake Schur qui ne démérite pas en tant que Rio Cutler. La relation qu'il noue avec Kid est prenante de même que celle qui en résulte avec Garrett. La comédienne Leila George offre une présence féminine non négligeable qui fonctionne très bien avec Jake Schur. Chris Pratt sous les traits de l'implacable salopard Grant Cutler est méconnaissable. Une gravité qu'il porte avec force. Il est frissonnant. La distribution secondaire est tout autant appréciable avec Ben Dickey pour le shérif adjoint Jim East, ou encore Samantha Zajarias, Adam Baldwin, Rachel de la Torre, Chad Dashnaw... Jusqu'à Vincent D'Onofrio qui en plus de réaliser le film, incarne le shérif Romero.



CONCLUSION :



En 2019, The Kid réalisé par Vincent D'Onofrio se dresse comme un western inespéré sorti d'outre-tombe faisant honneur au fan de far west que je suis. Un film intelligent au service d'une réalisation soignée pour des actions percutantes où on se régale de la performance des comédiens. Une histoire qui se joue du récit historique pour un résultat brillant.


À la frontière d'un grand western auquel il ne manque que la grandeur d'une portée bien plus étendue.



Vous aimez les merles bleus ? Y en a partout dans le monde. Le merle bleu de l'ouest est l'azuré ont toujours été mes préférés. J'allais les observer, quand j'étais jeune. Je suis revenu une fois et j'ai trouvé mon frère couché avec notre sœur. Je l'ai dit à mon père, j'ai plus jamais refait cette erreur. Il se fichait de ce que mon frère avait fait. Et il m'a dit que je devais apprendre à garder ma grande bouche fermée. Il m'a frappé. Avec un bâton de la taille de son bras, encore et encore. J'ai appris ma foutue leçon. Quand il a eu fini, j'ai plus jamais entendu aussi bien. Les doigts me picotent un peu. Je vois plus très bien. Mais il y a une chose que j'entends encore. Parfaitement. Les merles bleus. Et les jours où j'entends un merle bleu, je sais que c'est mon jour. Mon jour de chance. Et ce matin, shérif, il y avait des merles bleus dehors. Qu'est-ce que vous croyez que ça veut dire pour vous ?


Créée

le 4 déc. 2022

Critique lue 150 fois

23 j'aime

12 commentaires

Critique lue 150 fois

23
12

D'autres avis sur The Kid

The Kid
Buddy_Noone
6

Young gun

Acteur de talent, longtemps abonné aux seconds rôles marquants (Full metal jacket, Feeling Minnesota) et aux rôles de bad guys (Men in Black, Salton Sea, The Cell), Vincent D'Onofrio est surtout...

le 7 juil. 2019

11 j'aime

1

The Kid
RedArrow
5

Le choix de Rio

"On s'en fout que ce soit vrai ou pas ! L'important c'est ce qu'ils vont raconter une fois que tu ne seras plus là !" Cette phrase prononcée par Ethan Hawke dans "The Kid" ne pouvait pas mieux tomber...

le 27 juin 2019

6 j'aime

The Kid
mikeopuvty
8

Merci Garrett !

Acteur tentaculaire que l'on retrouve aussi bien dans des grosses machines à effets spéciaux ( Men in Black, Jurassic World ) que des petites productions intimistes ( Happy Accidents, The Thirteenth...

le 21 janv. 2020

4 j'aime

Du même critique

Joker
B_Jérémy
10

INCROYABLE !!!

La vie est une comédie dont il vaut mieux rire. Sage, le sourire est sensible ; Fou, le rire est insensible, la seule différence entre un fou rire et un rire fou, c’est la camisole ! Avec le Joker...

le 5 oct. 2019

172 j'aime

142