Les premières images de ce film, s'imposent comme un jardin au cœur de cendres qu'il traverse. Le souvenir d'un parfum délicat, à l'arôme discret des portes de l'intime, qu'il pensait inatteignable. Mais qui se révèle face à lui, dans ce lit, et ses yeux endormis. Quand ses bras se referment dans la nuit et que d'autres viennent caresser sa peau. Il comprend alors que son amour s'éloigne, que la passion ne brille déjà plus, et qu'il disparait de sa douce lumière. Un corps qui se dévoile à présent à des sentiments de passage, où souffle maintenant le regard noir d'un vent de colère, qui ne rêve plus que de paysage dévasté, aux images de feuilles mortes, et cette envie de les tuer.

David ( Clayne Crawford) est un homme que le feu dévore de l'intérieur pour sa femme, Nikki ( Sepideh Moafi), devant cet accord qu'il croyait pourtant possible, mais qui ne devient que cet instinct primitif en réponse. Une dichotomie, cette contradiction qui prend tous son sens à l'arrivée de ce sérieux prétendant, Derek ( Chris Coy ), une ombre au milieu de cette petite ville enneigée, entourée de ses montagnes lointaines, qui semble immobile, éternel. Comme ces vieux couples d'autrefois qui ont su dépasser ces grands froids, sans jamais se lasser un instant du sourire de l'autre.

Cette histoire, c'est celle d'un couple d'aujourd'hui, de ce monde. Un couple désespéré et leur 4 enfants qui subissent cette rupture sans comprendre. Eux qui n'attendent que le moment d'un royaume, unis pour toujours, une famille sincère et honnête, rempli d'incertitude, qui se bat afin d'y croire encore, malgré les chances qui s'envolent. Une forme d'allégorie sur la nécessité de ne pas abandonner, de lutter pour tous reconstruire.

Robert Machoian est un réalisateur de talent qui a su exprimer à travers cette histoire simple, belle, et triste, le gris de l'Amérique moyenne, son caractère tragique. Ces différents plans qui nous projettent parmi ces visages fait de nuances émotionnelle, tout en évitant le mélodrame. Le dessin d'une vie qui n'offre que peu de concessions. Un combat, ces échecs. Une exposition claire qui invite à la réflexion, ainsi que cette lutte interne qui nous plonge dans l'aspect thriller de ce film, et qui nous procure des situations imprévisible. Laissant planer une violence implicite, presque insupportable, par des bruits, un son, celui d'un révolver, qui sans cesse nous oblige à pénétrer l'univers intérieur de David. Un esprit torturé qui bouillonne de sa folie humaine, pour un exercice des plus audacieux, par son côté évocateur et suggestif dans l'intensité du suspense.

Une rage l'endure lorsqu'il la devine partir, et cette fin aux allures de tragédie grecque, traitée dans une dignité persistante, devient désormais la bataille de ses yeux, de ses mains, de sa bouche, où plus rien d'autre n'a d'importance. Devant ce concurrent qui ne disparaît pas, il veut redevenir le roi qu'il était, briser ses pas qui trahissent l'ambition d'un désir tant convoité, pour un royaume qui ne se partage pas.

Rolex53
7
Écrit par

Créée

le 12 janv. 2024

Critique lue 712 fois

10 j'aime

John Rolex

Écrit par

Critique lue 712 fois

10

D'autres avis sur The Killing of Two Lovers

The Killing of Two Lovers
Ecran-et-toile
8

Garder la flamme intacte ou la regarder s'éteindre?

« The killing of two lovers », c’est la petite mort d’un couple qui s’est aimé très vite, celle d’une famille divisée entre un père et une mère qui ont de plus en plus de mal à communiquer, à aspirer...

le 26 mai 2021

3 j'aime

The Killing of Two Lovers
Fatpooper
4

Pas facile la vie

Un peu chiant quand même. Dès le premier plan on sait à quelle sauce on sera mangé : une sauce froide et fade, parce qu'attendre si longtemps pour si peu, c'est vraiment pas bon. Les personnages sont...

le 19 juin 2021

1 j'aime

The Killing of Two Lovers
renardquif
8

Critique de The Killing of Two Lovers par renardquif

-Un film d'auteur américain, un couple avec des enfants qui va mal et qui se sépare, on sait que ce genre de pitch donne les pires films, mais, tout est une question de point de vue, ici le cinéaste...

le 31 mars 2022

Du même critique

Nomadland
Rolex53
9

L'expérience d'une vie, une route qu'elle ne veut pas trahir

Nomadland est un très beau film, sincère dans chacune de ses constructions dramatiques. Un art de la narration que Chloé Zhao, la réalisatrice nous propose à travers le voyage d'une femme, au visage...

le 16 nov. 2023

179 j'aime

2

Sans filtre
Rolex53
8

Idiot, mais riche

Je comprends maintenant, après avoir découvert ce film, pourquoi sans filtre a obtenu la Palme d'Or. C'est tout simplement le talent d'un réalisateur suédois, Ruben Östlund, qui réussit la...

le 17 oct. 2022

174 j'aime

4

Nope
Rolex53
4

Nope une apparition prometteuse, et puis plus rien dans le ciel

Get out, oui, us, peut-être, Nope, non. Cette tentative de déconstruction du concept d'Ovni, renforcée par une symbolique liée à la nature, ainsi qu'une certaine critique touchant à l'humanité, et à...

le 6 sept. 2022

155 j'aime

5