Tourné en 1989, "The king of New York", échec à sa sortie, est aujourd'hui considéré comme une oeuvre culte, un des films les plus aboutis d'un Ferrara sortant enfin de l'underground et pas encore récupéré par l'intelligentsia, qui livrera juste après son sulfureux "Bad lieutenant" et le définitif "Nos funérailles".
Produit avec des capitaux italiens, "The king of New York" permet cependant à Ferrara de continuer son exploration labyrinthique de la ville de New York, la représentant dans toute sa crasse et sa décadence, cité du vice et du péché gouvernée par des hautes sphères hypocrites se vautrant dans le luxe alors qu'elle est censée venir en aide aux démunis, faisant la sourde oreilles aux trafics qui gangrènent ses rues.
Un aspect politique et social qui vient enrichir une démystification en règle du milieu, Ferrara évacuant tout glamour dans sa représentation du gangstérisme, montrant ses anti-héros comme des businessmen camés prêts à dessouder le premier venu mais qui n'hésitent pourtant pas à faire preuve de charité. Un paradoxe renforcé par la confrontation musclé avec une autre sorte de mafia, celle des représentants de l'ordre, officiers aux méthodes parfois contestables donnant leur vie pour lutter contre un mal indestructible et surtout interchangeable.
Tout en s'éloignant de la représentation élégante du gangster véhiculée par Hollywood, le cinéaste donne pourtant des allures d'opéra à son "Parrain", poussant dans ses derniers retranchements l'esthétique 80's de son film, le transformant en pure oeuvre conceptuelle, les néons bleus allant jusqu'à exploser la rétine de spectateurs n'en demandant pas temps.
Donnant naissance à ce que l'on pourrait nommer le premier opéra gangsta-rap, Ferrara orchestre ici un des ses films les plus aboutis, plongée sans concession dans le milieu de la pègre new-yorkaise dominée par l'interprétation habitée d'un Christopher Walken semblant revenir de loin et de tout, épaulé par un casting impeccable comprenant Lawrence Fishburne, David Caruso, Wesley Snipes ou encore Steve Buscemi.