La principale réussite du film tient dans l'ambivalence du personnage de Walken. Un personnage proche de ceux de Scorsese et Schrader qui rêvent de faire le Bien en faisant le Mal, qui font le Bien en pensant faire du Mal.
Il est d'abord une bête nocturne, au teint cadavérique, un Nosferatu dans les buildings new-yorkais. Il rôde entre bas-fonds et palaces de luxe, imposant son inquiétante stature. Il tient la ville de part en part, par sa gâchette ravageuse et ses largesses de mécène.
Dès lors, où elle est la Loi et que peut-elle? Seuls quelques flics mués en shérifs tenteront de ramener un peu de justice avec les armes de l'injustice.
Le vice a resserré ses tentacules, et tout échappatoire semble une chimère risible. Et pourtant, quand sur la chemise blanche du King, le sang se met à couler, on se met à penser qu'une rédemption est possible.
Ferrara cherche à représenter un New York abstrait, une entité lointaine dont les reflets inquiétants happent le personnage de Walken. Les intérieurs paraissent tout autant irréels, comme sortis d'autres espaces-temps. Enfin, l'intrigue est volontairement réduite à des figures rebattues des films de gangsters et de Mafia, avivant sans peine la mémoire des spectateurs. Tout concourt à transformer ce film en un conte noir, tout autant moral que poétique.