Yamashita, un vétéran du genre (Big Time Gambling Boss, Lady Yakuza, Nihon Jokyo-den...) s'essaie ici à un film quasi-biographique autour du personnage réel de Moriyuki Hatani (1929-1994), un homme-clé dans la résolution du conflit qui a opposé pendant plus de vingt ans (1950-1972) les différentes factions yakuza de la région d'Hiroshima. Cette guerre des gangs a également servi de toile de fond à la mythique série des Combat sans code d'honneur, mais la comparaison s'arrête là tant ce Dernier Yakuza (The Last Gambler ou The Last True Yakuza en anglais) apparaît comme une sorte d'antithèse à la géniale série de Kinji Fukasaku, sur le fond comme sur la forme.
Là où le personnage au sang chaud incarné par Bunta Sugawara dans les films de Fukasaku entraînait son monde dans une spirale incontrôlée de violence, ici Moriyuki (Hiroki Matsukata) est plutôt un pacificateur, un conseiller habile qui cherche à régler les tensions entre les différents protagonistes. Le film est plus posé. L'histoire s'étale sur près de quarante ans, de sa jeunesse dans un milieu pauvre au contact des yakuzas de l'ancienne école jusqu'à son ascension parmi les boss d'Hiroshima qu'il ramène à la raison. Ce parcours biographique qui s'étend sur deux heures fait à la fois l'intérêt -- pour qui apprécie tout le décorum yakuza -- et la faiblesse du film de Yamashita. L'aspect documentaire historique prend le pas sur la fluidité narrative et donne un résultat saccadé et assez ennuyeux. Point de temps fort ni de scènes d'action, tout se déroule calmement. Il aurait peut-être mieux valu ne traiter qu'un seul pan de la vie de cet homme plutôt que de chercher à condenser un parcours aussi complexe. La mise en scène est lourde et ressemble à celle des téléfilms historiques diffusés en prime sur les chaines japonaises.
Quelques qualités indéniables, mais un film à réserver avant tout aux fans hardcore du yakuza-eiga qui voudraient en apprendre un peu plus sur l'histoire de ce milieu. C'est d'ailleurs l'une des dernières saillies d'un genre déjà à bout de souffle lors de sa sortie (1985).
PS : je n'arrive pas à savoir si l'enka que l'on entend dans la dernière partie du film (lorsque le boss Tomoda se fait bander avant la cérémonie) est interprété par Matsukata lui-même.